Voilà le film à faire voir à celui que les drames ont lassé. Lucchetti ne trouvera pas le même équilibre dans La Nostra Vota à mon avis, mais je dis quand même "sì" ! Il confirme qu'il est un refondeur de genres, créant pour l'occasion un alliage très facile à classer mais novateur quand même : j'appellerais ça une comédie dramatique politico-familiale.
Les lignes de crêtes multiples vont converger vers un sommet venteux mais magnifique : le pic où s'affrontent symboliquement le fascisme et le communisme dans une lutte sociétale perdurante et cinégène. Dommage, par contre, que le film réponde aussi à l'apparente obligation qu'une convergence soit étouffante ; la moitié du film est comme un goulot d'étranglement qu'on ne passe qu'au prix de se presser le ventre contre une doctrine et de se racler le dos contre l'autre.
Mais s'il fallait une preuve que Luchetti sait où il va, c'est que le terme "tragicomique" lui convient si bien. On sourit de tout malheur parce qu'on en rit où l'on le dédramatise ; c'est une faveur que le réalisateur nous fait de réduire l'adage "à toute chose malheur est bon" à l'échelle d'un scénario, et de ce qu'il peut nous apporter le temps d'un visionnage. Pour selon qu'il regarde des deux côtés de la clôture (le titre du roman dont c'est tiré est "Il Fasciocomunista"), il ne cherche pas à nous faire voir que l'herbe est de couleur différente. En fait, la clôture devait être ouverte puisque son caméraman a le "champ" libre et volette de loin en loin pour innocemment capturer la tendresse, ainsi qu'une impulsivité méridionale aux mains bien occupées puisqu'elle sert de contreforts à une adolescence italienne touchante, quoique témouine d'un bourrage de crâne.
On peut reprocher à Lucchetti d'avoir trop recherché le conflit et les causes de l'éducation plutôt que sa phénoménologie, car les acteurs, tout brillants qu'ils sont, ont à lutter contre une politique qui s'insère en eux comme un parasite manichéen plutôt que l'apport d'un spectre d'opinions. Mais c'est le tort de la jeunesse de croire que tout est blanc ou noir... ou rouge. Une œuvre qui va jusqu'à chorégraphier les disputes sans jamais empiéter sur la spontanéité liant deux adèlphes, une comédie mesurée, un drame feel good de qualité.
Quantième Art