Maïwenn n'a pas sa pareille pour décrire les incohérences des gens, pour mettre en scène le manque d'échange entre le rationnel et l'émotionnel chez une personne. Dans le Bal des actrices, elle faisait le constat, par-delà la moquerie, du caractère égocentré des actrices parisiennes en vogue. Par-delà la moquerie, car Maïwenn n'est pas dans la dénonciation, dans la prise en faute de personnages, mais dans le constat d'un système qui pousse les gens à agir d'une certaine façon, dans le constat d'un déterminisme social. De la même façon dans Polisse, elle montrait une équipe qui faisait face de façon quotidienne à de la négativité, aux ravages que les abus physique font sur les personnes, et de la façon dont la brigade des mineurs les prend en charge. Elle mettait bien en valeur les conséquences que ce métier avait sur la brigade elle-même, s'attachant aux parcours de ces personnalités, de la dichotomie impossible entre leurs vies personnelles et leurs vies professionnelles.
Dans Mon roi, Maïwenn s'attaque au dur, à l'essence du relationnel : la relation de couple. De la construction d'un homme et d'une femme dans la société d'aujourd'hui. La société change vite, mais les traditions héritées d'une éducation pas toujours bien assumée font long feu. Que nous-dit Mon roi? Une femme soi-disant faible mais finalement forte a affaire à un homme aimant, mais inconstant. Il est trompeur, arbitraire et cru. Maïwenn aime ce genre de personnages, en proie à leurs incohérences, difficile à vivre mais aimable, dans le sens premier du mot, c'est-à-dire qui est capable, qui peut être aimé, malgré son comportement en dent de scie. Le film prend le point de vue de la fille, et en cela, il décrit exactement les questionnements qui la déchire : elle est en face d'un gamin sexy et autoritaire. Qui est-elle pour tolérer cela? Une femme elle-aussi en proie à ses contradictions, en proie à ses incohérences, par ce qu'elle tolère, par ce qu'elle revendique.
Mon roi est l'histoire d'un certain couple. Je viens de tenter une interprétation prudente, vague et hasardeuse, mais il y en a de multiples possibles. C'est bien la force d'une Maïwenn, une des réalisatrices françaises actuelles les plus subtiles, les moins manichéennes qui soit. Mon roi n'est pas tout le temps agréable, mais il est dans le vrai, dans le dur, dans le réel du relationnel empêché, contradictoire et incohérent. Il n'y a pas de fautifs, il n'y a pas de bien et de mal, il y a juste des êtres humains déboussolés mais aussi définis par leurs déterminismes et leurs instincts.