Dès les premières secondes, le spectateur est happé dans un tourbillon visuel d’une richesse inouïe. Les couleurs, les tableaux, et les détails, d’une minutie presque hypnotique, composent un univers à couper le souffle. Impossible de détourner le regard, le film nous captive sans relâche jusqu’à la dernière image.
Le sujet de départ est à la hauteur de cette splendeur visuelle : un conte épique ancré dans le Japon féodal, où les histoires personnelles et collectives s’entrelacent. Les thèmes universels du pouvoir, de la jalousie et de la vengeance se mêlent, nourrissant l’aura mystique du démon vengeur au cœur de cette histoire. Chaque scène semble s’imbriquer dans un écrin de symbolisme, enrichissant le sous-texte d’une densité fascinante.
Cependant, l’œuvre pâtit d’un choix narratif et stylistique audacieux, sans doute trop expérimental pour son propre bien. Les dialogues, frénétiques et cryptiques, flirtent avec une incompréhensibilité assumée, tandis que le montage – à base de coupes effrénées, souvent inférieures à une seconde – brouille les repères. À plusieurs reprises, on se retrouve submergé, ballotté entre les arcs narratifs multiples, qui changent et rechangent en quelques secondes à peine. Le résultat est une narration éclatée, où l’intensité visuelle semble cannibaliser la lisibilité de l’histoire.
Paradoxalement, un dépouillement aurait peut-être sublimé l’ensemble. Moins de dialogues, une narration plus implicite, auraient pu renforcer la dimension contemplative du film. Laisser l’œuvre se suffire à sa splendeur visuelle aurait permis d’en faire une expérience presque mystique, où chacun aurait pu choisir d’interpréter ou simplement de se laisser emporter.
"Comprenne qui pourra" aurait pu devenir le mantra de cette épopée, transformant la frustration en enchantement. Mais même dans ses excès, ce film reste un bel exemple d’audace et de beauté, qui, malgré ses imperfections, marque durablement l’imaginaire.
J'aurais souhaité lui donner une note de 5,5: les demi-notes n'étant permises, je me cale sur la plus basse entre 5 et 6, car la pesanteur des dialogues, par moment incompréhensibles jusqu'à en devenir imbuvables, ne me permet pas plus d'indulgence.