Critique éditée le 11 octobre 2024
Quel est cet homme que les voisins croisent dans la cour de l'immeuble tel un métronome à des heures régulières? Tout ce qu'on sait se résume à son nom, monsieur Hire et qu'il exerce le métier de tailleur. Personne n'arrive vraiment à cerner cette personne renfermée sur elle-même et misanthrope. Toujours vêtu en noir, tenue qui correspond parfaitement à sa vie mystérieuse, on le voit traverser la cour de son immeuble passant parfois pour la tête de turc des enfants. Un beau jour, non loin de chez lui, le corps d'une jeune fille assassinée est découvert et bien entendu une enquête va être menée pour retrouver le coupable. Pour l'entourage et la police monsieur Hire est le suspect idéal à la vue de son attitude bizarre.
Parfois il fait un tour au bowling, seul endroit où il arrive à se faire un peu admirer pour son adresse. Rentré dans son appartement meublé à l'unisson de sa morose personnalité, il accomplit ses obligations de routine entre autres s'occuper de ses souris blanches, recevoir accessoirement un inspecteur de police suspicieux et squatter sa fenêtre. Derrière la vitre il peut épier les moindres faits et gestes d'Alice, une jeune et jolie locataire d'un studio situé juste en face de chez lui. Il apprend plein de choses d'elle et bien sûr l'homme en devient secrètement amoureux. Cette habitude de l'admirer le tenaille, il la dévore des yeux sous le son envoûtant d' un très beau "Quatuor en Sol Mineur de Brahms" il découvre même que la jeune fille à un petit ami, Emile qui vient lui rendre visite e la serrant dans ses bras. Ce Emile n'est peut -être pas un inconnu pour l'observateur...
Le stratagème finit par avoir une fin, Alice aperçoit le visage de monsieur Hire à son poste d'observation. C'est alors qu'elle se décide à faire une visite surprise au personnage un peu trop curieux. Celui-ci se montre surpris mais semble s'enhardir. Il sort même de chez lui pour assister à un combat de boxe. Pendant le combat Il profite d'une courte absence d'Emile pour tenter des gestes tendres envers la jeune fille et là il paraît enfin touchant. Est-ce un tournant de sa vie? Pourquoi devient-il aussi hardi lorsqu'il propose un voyage en Suisse à Alice qui semble accepter?
Monsieur Hire est ponctuel au rendez- vous à la gare de Lyon, il est sur le quai avec ses valises. Le train démarre et l'homme désabusé restera seul avec ses bagages et rentrera chez lui. Est-ce un autre tournant dans sa vie, une glissade? A-t-il été un jouet, le fruit d'une malheureuse manipulation?
A son retour chez lui, l'inspecteur de police est présent, Alice également. S'adressant à la jeune fille il lui avoue " je suis triste à mourir". Ainsi va la vie pour monsieur Hire...
Alternant à mon goût le bon et le moins bon, le réalisateur Patrice Leconte nous gratifie avec ce film d'un petit bijou qui ne peut passer inaperçu dans le cinéma français. Reconnaissons qu'il a le mérite de réaliser des comédies parfois très bonnes mais aussi parfois plutôt faiblardes pour passer à des films plus dramatiques et souvent très réussis: "Le Mari de la Coiffeuse", "L'Homme du Train" et ici "Monsieur Hire". D'autre œuvres intéressantes de sa part nous attendent et j'aurai certainement plaisir à vous en faire la critique.Ce film est adapté d'un roman de Georges Simenon paru en 1932: "Les fiançailles de Monsieur Hire".
Je n'ai jamais lu cet ouvrage mais lorsque j'ai vu ce film magnifique je n'ai qu'une envie, me plonger dans sa lecture. Cette adaptation cinématographique est une réussite totale. L'intrigue est à la fois palpitante et fascinante. Il y a là un personnage principal absolument taciturne à souhait dont en fait personne ne sait grand chose. Y a t-il du bon en lui? Oui bien entendu mais cette bonté est très profondément cachée. Dans la noirceur de sa tenue vestimentaire, avec son visage de cire, cet homme paraît inquiétant, c'est le genre de type qui porte tous les défauts du monde et qu'on n'a pas envie de fréquenter. Michel Blanc réussit là un véritable tour de magie en se mettant dans la peau de cet homme blafard et presque repoussant autant par son caractère que par sa physionomie. Par petite touche il se dévoile et nous prouve qu'il est capable d'avoir de la tendresse et peut-être d'être amoureux. Là aussi Michel dans ce film tu étais sur un coup et prêt à conclure, hélas pour toi encore loupé... mais tu as réussis le principal, être un putain d'artiste. Je me souviendrai de ta dernière scène qui est absolument poignante et géniale. Sandrine Bonnaire
, Alice, est au diapason, elle se montre convaincante dans cet habit de femme amoureuse et fatale se laissant entraîner dans une aventure improbable entretenant le mystère d'une telle liaison avec un homme qui n'a rien de commun avec elle. C'est un beau et grand rôle à la mesure d'une si belle réalisation.Un très grand merci à Patrice Lecomte pour nous avoir offert un tel cadeau, un cadeau qui reste gravé dans la mémoire, un cadeau qui a le mérite immense d'avoir conquis le public à un moment où le cinéma français était à la peine dans le box-office, il fallait oser. Il a osé et le public a tout de même suivi, il a eu raison et c'est bien là le principal. Quant aux jurys du "Septième Art", eux sont restés en retrait malgré les nominations mais là nous en avons l'habitude.
Box-office France: 608.468 entrées
Ma Note: 9/10