Raz-de-marée musical et visuel, Moonage Daydream procure un état de sidération galvanisante avec son ouverture qui résonne dans la cage thoracique. Le même étonnement béat qui nous décrochait la mâchoire lorsque les premières notes de So may we start... des Sparks lançait le Annette de Leos Carax.
Sauf que Brett Morgen, avec la complicité unique de la famille de Bowie qui explique le nombre ahurissant d'archives inédites, tient le rythme du début à la fin. De l'électro de Hallo Spaceboy, aux percussions de Rock 'n' Roll Suicide, Morgen nous livre un trip psychédélique dans la galaxie Bowie à la cadence effrénée. N'y attendez guère un documentaire traditionnel, des archives contextualisées ou des facecams et autres témoignages sur l'Homme au mille visages. Moonage Daydream est une incursion brute dans l'univers de l'artiste, suivant en fil rouge les différentes personnalités du britannique excentrique.
Alors certes vous entendrez Bowie parler de sa mère, du rôle de son frère, de l'époque, de la création, de l'art, de la sexualité, mais plus pour contextualiser les moments, les ancrer dans l'époque, et mieux nous faire profiter des chefs d'oeuvre de chaque période-Bowie.
Le cinéma n'y échappe pas ! D'ailleurs, j'ai écrit pour Cineman un petit article à l'occasion de la sortie de Moonage Daydream : David Bowie, un caméléon venu des étoiles à (re)découvrir en 5 films. J'y évoque cinq métrages gravitant autour ou avec David Bowie, que je ne peux conseiller de (re)voir avant la découverte de ce documentaire.
Un en particulier, L'Homme qui venait d'ailleurs, de Nicolas Roeg. Etrange SF un brin hermétique ayant parfois un peu vieilli, il n'en reste pas moins une magistrale métaphore de la vie de Bowie. Un être esseulé, faisant figure d'alien perdu dans un monde sur lequel il semble toujours avoir une longueur d'avance. La solitude étant d'ailleurs un thème récurrent de l'oeuvre de Bowie, y compris dans ses réalisations picturales que Moonage Daydream révèle en partie.
On pourrait regretter peut-être le passage un poil trop rapide sur la période Blackstar, mais qui a l'avantage d'éviter le tire-larme si facile dans les biopics d'artistes disparus.
Bref... Foncez en salle, profitez du son qui tabasse et résonne dans la poitrine, laissez vous hypnotiser par les montages de Brett Morgen, perdez-vous dans les méandres de l'un des artistes les plus brillants de notre temps. Moonage Daydream c'est immense, probablement le meilleur film musical depuis The Wall des Pink Floyd, alors profitez-en.