Une mélodie douce-amère (presque) sans fausse note

Sorti en 2016 et réalisé par Barry Jenkins, Moonlight est surtout connu pour être le film qui a privé La La Land de l'Oscar du meilleur film. C'est en tout cas de cette façon que j'ai appris l'existence de ce film et c'est ce qui m'a donné envie de le découvrir, sachant que j'aime beaucoup La La Land. Moonlight c'est donc l'adaptation d'une pièce de théâtre assez originale, puisqu'on va suivre la trajectoire d'un jeune afro-américain sur trois étapes de sa vie (à neuf ans, seize ans et vingt-six ans). On va suivre son évolution dans un contexte très difficile, puisqu'il est victime de harcèlement scolaire, il est chétif et ne sait pas se défendre et qui plus est, sa mère est une junkie. Et en plus, ce jeune garçon va peu à peu découvrir son homosexualité, chose qui n'est pas facile à assumer dans un milieu où règne la "culture de la rue". Vous l'aurez compris, Moonlight est une œuvre très sombre et très forte d'un point de vue émotionnel.

Moonlight se joue en trois actes, les 3 étapes de la vie de Chiron Harris (enfant, adolescent et adulte). Le premier acte est intitulé Little, le surnom du petit Chiron neuf ans (Alex R. Hibbert). Chiron (aka Little) est martyrisé par ses camarades, qui le traitent de mauviette et il n'a qu'un seul ami Kevin. Et alors qu'il fuit ses oppresseurs, il rencontre Juan (Mahershala Ali) un dealer d'origine cubaine qui va devenir son protecteur. Et pour couronner le tout, la mère de Chiron (Naomie Harris) est une Héroïnomane. Bref, le film est centré sur les noirs américain, dans une communauté noires américaine pas très tendre avec Chiron. Ce premier acte met tout de suite dans l'ambiance. C'est clairement, selon moi, le meilleur des trois actes. Il y a de nombreuses scènes à la fois déchirantes et tendres. Dans le rôle de Juan, Mahershala Ali apporte beaucoup au film, il crée une dynamique très intéressante avec le jeune garçon. Je pense notamment à cette magnifique scène dans l'eau où il lui apprend à nager, très belle scène, très bien filmée et qui dégage beaucoup d'émotions. Mahershala Ali a bien mérité son Oscar pour le meilleur acteur dans un second rôle. (8.5/10 pour le premier acte)

Le deuxième acte est intitulé Chiron et on le retrouve à seize ans (Ashton Sanders). Premier fait majeur, Juan a malheureusement disparu du récit. En effet, on apprend sa disparition de façon détournée, au détour d'une conversation. Chiron se retrouve donc sans protecteur et il va en baver durant cet acte. D'une part, il devra faire face à la haine de ses camarades de classe et d'autre part, sa relation avec sa mère ne va pas s'arranger, au contraire. Sa mère est complètement défoncée et folle avec lui. Et même si c'est une mère indigne, on sent qu'il y a toujours de l'amour pour son fils. Mais voilà, elle est incapable de se reprendre, elle est complètement accroc à l'héroïne. C'est aussi durant cette étape de la vie, à l'adolescence, qu'il va découvrir son homosexualité, lors d'un baiser avec Kevin sur la plage. Cette partie est la plus dramatique et intense des trois actes. C'est Naomie Harris qui interprète la mère de Chiron dans les trois actes et sa performance est à chaque fois excellente. Mais c'est vraiment dans ce second acte que son rôle prend de l'ampleur dramatique. Naomie Harris, elle aussi, a bien mérité sa nomination pour l'Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle. (8/10 pour le second acte)

Le troisième acte est intitulé Black (le nouveau surnom de Chiron) et on retrouve Chiron dix après, à l'âge adulte (Trevante Rhodes). Chiron (aka Black) a complètement changé de vie, il sort de prison et est devenu dealer à l'image de son protecteur et modèle Juan. Cet acte se concentre sur les retrouvailles entre Chiron et son ami/amant d'enfance Kevin. C'est Andre Holland (le chirurgien noir dans la série The Knick) qui interprète Kevin à l'âge adulte. Pour tout dire, je n'ai pas complètement adhéré à ce troisième et dernier acte. Je n'ai rien contre les deux acteurs qui interprètent Chiron et Kevin à l'âge adulte, mais je n'y crois plus. Que ce soit physiquement ou dans le jeu des acteurs, je ne reconnais pas les deux gamins des deux premiers actes. Alors certes, dix ans se sont écoulés entre-temps, mais tout de même. Chiron a pris vingt kilo de muscles et Kevin, qui vit maintenant seul avec son fils, veut renouer le contact avec son ami pas revu depuis plus de dix ans. C'est tellement gros et cliché comme situation, à l'inverse des deux premiers actes qui sont tellement réalistes. De cet acte, il n'y a qu'une seule scène à sauver, celle des retrouvailles entre Chiron et sa mère, une très belle scène de rédemption. Sa mère s'excuse et son fils s'excuse à son tour, c'est très émouvant. Mais sinon, je ne me suis pas autant impliqué émotionnellement dans cet acte, que dans les deux premiers. Sur la fin (les vingt dernières minutes), le film devient long, pompeux et se conclue avec un happy-end mal venu (6/10 pour le troisième acte)

Au final, Moonlight est un film vraiment prenant émotionnellement, même si inégal selon les trois actes. Toujours est-il que parler d'homosexualité, qui plus est dans le milieu noir américain, c'est osé et salutaire. Il faut aussi mentionner que c'est un film avec que des acteurs noirs et pourtant, il n'évoque pas une seule fois le racisme ou la ségrégation des noirs, puisque ce n'est pas le sujet ici (contrairement à Green Book par exemple). Le film n'est donc pas tombé dans ce piège, chose qui aurait été pourtant facile. Par contre, il tombe malheureusement dans le cliché complet dans son troisième acte, chose que je regrette, tellement les deux premiers actes sont réussis. (7.5/10 pour le film)

Créée

le 8 nov. 2024

Modifiée

le 9 nov. 2024

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