Les bonnes vieilles histoires au coin du feu, pour frissonner entre amis… C’est ce que décident de se raconter un groupe de quatre adolescents après un accident de voiture, en attendant les secours. Dans la première, un couple de jeunes mariés partis en lune de miel dans un camping car se retrouve confronté à une menace dans les bois. Dans la deuxième, une jeune fille est la cible d’un étrange personnage. Dans la troisième, un motard rencontre une jeune femme dans une maison abandonnée. Et la dernière histoire, c’est celle que vivent ces adolescents sans le savoir...
D’un postulat de départ d’une simplicité déjà vue, le film arrive pourtant à prendre des détours ou des angles intéressants, malgré la diversité des équipes travaillant pour chaque segment. Sans verser dans l’horreur clinquante, chaque partie prend pour cadre une situation qui pourrait être réelle confronté à une menace extérieure. C’est le propre des légendes urbaines, des histoires au coin du feu (c’est d’ailleurs le titre en VO), d’avoir un pied dans la réalité pour mieux nous faire peur.
Mais le deuxième segment est troublant, car il a poussé le curseur dans la peur concrète, en préfigurant des difficultés qui allaient venir avec la pédophilie sur internet. Le film date de 1997. Google n’a pas encore été lancé. Amanda, dans une interface de chat très austère, discute avec un prédateur qui se fait passer pour une jeune fille. Ce dernier sait où elle habite, et va donc la rejoindre.
Un tel sujet relève du fait de société, et il est à craindre que le film en fasse trop. Et pourtant, il est assez juste. Il est inquiétant car il arrive aussi à nous faire respecter ses personnages qui, compte donné du peu de temps réservé pour les développer, ont chacun une personnalité qui les rend attachants. Malgré un certain classicisme pour le premier segment, on craint pour les deux amoureux. C’est la relation nouée avec le spectateur et les deux personnages qui rend la chute du troisième aussi bouleversante. Et ce n’est pas fini, la conclusion de ces adolescents autour du feu est un incroyable retournement, qui éclaire un certain passage de l’introduction et retourne tout le film. En plus de franchement serrer le coeur.
Il y a une certaine intelligence, un vrai soin qui se retrouve partout. Du scénario à la réalisation, qui ne manque pas de bonnes idées, de plans bien placés. Lors de l’attaque du camping-car, il y a une tension très forte, la caméra rendant l’exiguïté du lieu menaçante, les coups portés le rendent angoissant. Le film date de 1997, et pourtant il est moderne, aussi bien sur certaines de ses thématiques que sa technique ou sa réalisation.
Le film est un mystère. Il y a une unité de ton et de réalisation qui gomme l’apport de chacun des réalisateurs ou des scénaristes. Tout au plus pourrait-on remarquer quelques distinctions, sans trop y croire. Dans ce genre de films anthologiques, il y a toujours des segments plus faibles. Mais même le plus simple reste de bonne facture, et ne déçoit pas. Avec une telle équipe si nombreuse, c’est d’autant plus remarquable d’arriver à un ensemble si bien travaillé, si bien coordonné.
Et c’est d’autant plus dommageable que le film n’est sorti qu’en vidéo, alors qu’il avait toutes les prétentions pour briller au cinéma. Scream avait pourtant lancé toute une vague de films d’horreur pour adolescents qui a vu trop de faderies pourtant populaires. Peut-être que sa liberté de ton a pu inquiéter, en faisant de ses légendes urbaines des avertissements parfois glaçants ou en sachant apporter une douce moralité à certains comportements adolescents. Sans être d’une grande prétention, mais en sachant se montrer malin et consciencieux, le film est bien au-delà de la plupart de ses cousins. C’est plus qu’une surprise, c’est une formidable découverte qui rassure : il est toujours possible de trouver des perles, de celles qui redressent la barre vers le haut.