Mon Dieu que j'aurais pas aimé avoir à assumer la communication autour de ce film. Parce que le COVID et toute la polémique autour d'Armie Hammer lui ont collé au cul et l'ont empêché de sortir bien plus tôt (en octobre 2020), mais surtout parce que les têtes d'affiche du film portent chacune des affaires qui ont quelque peu entaché le projet aux yeux de pas mal de monde (mais pas les miens) : l'amour d'Armie Hammer pour la chair de ses partenaires, mais aussi les positions de Gal Gadot vis-à-vis du conflit israélo-palestinien (positions qui semblent perturber davantage les gens que son jeu d'acteur).
Mais voilà que le film sort enfin dans les salles obscures et remercie aimablement tous ceux qui auront eu la patience d’en attendre la sortie. Mort sur le Nil est une suite (sans en être réellement une) du Crime de l’Orient-Express sorti en 2017. Ce film propose un schéma quasi-similaire au premier, met le même détective en avant, prêt à résoudre un meurtre dans un décor exotique au fin fond de l’Egypte autour d’un casting étoilé. J’ai beaucoup apprécié À Couteaux Tirés, et c’est l’une des raisons qui m’ont poussé à le voir tant le film de 2017 ne m’avait pas réellement marqué, bien que je l’ai tout de même trouvé intéressant et captivant dans la façon dont le suspense nous pousse à garder le souffle coupé (là où Knives Out m’a plutôt déçu). Mort sur le Nil se veut plus sérieux, plus grand.
Le film de Kenneth Branagh est bien plus qu’une suite puisqu’il nous donne davantage d’informations sur la naissance du personnage d’Hercule Poirot et sur son passif qui continue de le tourmenter via des détails glissés dans certaines scènes, mais surtout grâce à une introduction d’une dizaine de minutes justifiant (assez honteusement j’ai trouvé) la raison pour laquelle Poirot porte la moustache… L’une des forces du film sont les efforts de Branagh à donner plus de profondeur à un personnage dont on est beaucoup à n’en connaître que très peu… et bien que j’ai apprécié ces détails, je ne les ai pas trouvé utiles pour autant tant ils sont simplistes et répétés à longueur du film, leur retirant le peu d’importance qu’on aurait pu leur donner. Il en est de même pour l’amitié qui unit Poirot et Bouc… une amitié renforcée dont on a pourtant que très peu d’informations.
Des informations, on en a pourtant sur à peu près chacun des personnages suspectés du fameux meurtre sur lequel le film se concentre à partir d’un peu plus d’une heure. Armie Hammer joue un mari tout frais qu’on sait avide de fortune, Gal Gadot une mariée pleine aux as et bien attachée à sa caste, Emma Mackey une femme trahie par ce qu’elle pensait être un amour très puissant. J’ai trouvé le jeu de Mackey réjouissant quand celui d’Hammer et de Gal Gadot m’a fait soupirer (les deux n’ont aucune alchimie). Le reste du casting s’en sort très bien.
On en a pour un peu plus de deux heures et c'est divisé en deux actes (trois selon Poirot). Un avant, un après. Si j’ai trouvé la seconde partie plus intéressante que la première (dont le but simple est de présenter chacun des personnages) qui est lente, qui casse un peu le rythme du film et qu’on aurait facilement pu écourter, à mon sens, d’une petite quinzaine de minutes. J’aurais bien aimé que « l’enquête » prenne davantage de place à l’écran et écrase tout ce qui la précède.
Et donc pendant un peu plus d’une heure de films, on nous offre un grand aperçu d’un mariage ruiné par un tueur qui aura décidé de leur pourrir leur lune de miel… et qui aurait bien pu faire ça ?
On en pas censé en savoir grand-chose. On est censé être bouche-bée à la fin du film quand Poirot résout enfin les quelques crimes ayant eu lieu tout au long de la croisière… mais on l’est pas tant le film nous donne toutes les réponses bien avant la fin. Le suspense est inexistant (d'où le titre, z'avez capté??), et n’importe qui a des yeux bien ouverts et une logique un minimum construite peut deviner l’auteur du meurtre que Poirot prend pourtant 2h20 à résoudre. C’est gros comme un camion, c’est même franchement prévisible en plus d’être foutrement logique… Et c’est peut-être l’aspect du film (central, certes) qui me déçoit le plus. Parce qu’on va voir un whodunit pour faire marcher ses méninges et froncer des sourcils à chaque interrogatoire, et non pas pour voir le tout venir avant même que tous les invités ne s'engagent sur le navire. C'est l'une des raisons qui me poussent à préférer le Crime de l'Orient-Express (qui lui au moins a su garder son suspense jusqu'à la fin).
Le film parvient tout de même à nous régaler. On a une bonne mise en scène, un super casting dont on se sert habilement (sauf pour Rose Leslie qu’on ne voit que très peu ; une honte), on a de magnifiques plans et de longs panoramiques justifiant à eux seuls le fait que l’intrigue se déroule en Égypte (parfois desservis par des effets spéciaux mal foutus qui sautent aux yeux), on en apprend davantage sur l’origin story de Poirot (ou sur celle de sa moustache... et que c'est risible tant c'est nul et que ça aurait mérité davantage de créativité)... et on a surtout un joli p'tit scénario (quelque peu simpliste par moments, mais sympatoche quand même).
J’en attendais juste un peu plus. Parce que le trailer vendait quelque chose de plus grand, parce qu’Armie Hammer, Gal Gadot, Emma Mackey et Letitia Wright dans le même film, c’est censé donner quelque chose… quand même !
Mais c'est un bon film. Simple, honnête sur ce qu'il vend... et ça me convient.
Sali par un manque de suspense atroce et de surprises, par des soucis de scénario, quelques longueurs et de grands problèmes de CGI… mais un long-métrage sympathoche qui plaira à ceux à qui Hercule Poirot a manqué, aux amoureux d’Agatha Christie, à ceux qui ne savent pas se décider sur le truc devant lequel ils passeront leur soirée… ou aux amoureux des têtes d’affiche, s’il y en a encore.