Givre de la jungle
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À l'instar de Mowgli, Andy Serkis aura dû traverser un parcours du combattant pour sortir son film éponyme. Tourné en 2015, le film a enchaîné les obstacles jusqu'à donner l'impression d'une maudite arlésienne. D'abord, il a dû composer avec un travail de post-production logiquement exigeant. Puis, avec la sortie du projet concurrent de Disney (Le Livre de la Jungle) qui lui a coupé l'herbe sous le pied. Et enfin, avec l'apparente frilosité de la Warner qui, dans la dernière ligne droite, a "repassé" le bébé à Netflix pour éviter la contre-performance.
Partons de ce dernier point, puisqu'il est facilement compréhensible. Oui, vu le budget conséquent alloué à Serkis (100 millions de dollars, au bas mot) et le contexte compliqué, difficile de se sentir rassuré par un film au ton résolument plus adulte que Serkis entendait respecter. Dès les premières minutes, Mowgli impose sa différence avec la version de Jon Favreau sortie en 2016. Ici, malgré des évidentes similarités dans l'histoire, on est plus proche de l'œuvre de Kipling que de son adaptation animée des années 60, que la version Disney/Favreau a allègrement singé sans le génie. Sombre, âpre et parfois même violente, Mowgli pose un regard aussi émerveillé que lucide sur ce monde foisonnant de vie mais où chaque recoins peut s'avérer mortel.
Un univers sauvage mais ordonné que l'homme (fut-il petit) pourrait bien déstabiliser jusqu'à le réduire en cendres. Oui, les thématiques sont les mêmes, nous sommes d'accord (quoi de plus logique, en même temps). Mais la mise en forme diffère radicalement. Et cela se ressent sur des choix artistiques malins.
Au lieu de tenter le photo-réalisme, on serait ici plus proche du morphing. Serkis préfère "mélanger" les traits humains et animaux afin de brouiller cette frontière entre les deux. Le résultat peut d'abord interloquer, il s'impose néanmoins rapidement car il est en parfaite adéquation avec le propos. Mowgli est bien ce conte moral parsemé d'animaux qui posent des questions sur la condition humaine. Et le casting a de la gueule (Christian Bale, Benedict Cumberbatch, Serkis lui-même, ou Cate Blanchett). Mowgli bénéficie également de la composition lumineuse de son jeune interprète Rohan Chand. Il faut bien sûr saluer l'énorme travail sur les effets visuels, d'une impitoyable beauté, et également la composition musicale discrète mais mélodieuse, parfaitement raccord avec le récit allégorique mêlant rudesse et poésie.
Je reprocherai au film d'avoir deux parties malheureusement inégales, malgré leur grande qualité plastique. Un travail plus précis sur le rythme aurait sans doute permis de les équilibrer de manière plus fluide. L'une et l'autre aurait été plus facilement conciliables si elles s'étaient imbriquées au fur et à mesure et non d'un seul coup. Cela n'enlève en rien leur richesse mais les empêche de s'élever encore bien au delà de ce qu'elles sont quand on les prend séparément.
Plus superficiellement, je regrette que Mowgli se soit vu privé d'une sortie en salles car il me parait évident qu'il a l'avantage d'offrir une immersion et une personnalité qui lui donne toute sa légitimité. Néanmoins, le film existe. Et c'est déjà très bien.
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Créée
le 26 juil. 2019
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