Gavin O’Connor est un réalisateur que l’on pourrait typiquement qualifier de « faiseur efficace ». Sa filmographie n’est pas transcendante mais il a offert ici et là quelques films plaisants voir vraiment bien fait comme son Warrior en 2011. Même si à l’époque il n’avait pas dévier des codes du genre qu’il explorait, il parvenait à en tirer le meilleur, au contraire de son dernier film Jane Got a Gun où il ne parvint pas à dynamiser son western, le faisant tomber dans l’oubli. Jamais il n’a vraiment dévié du cahier des charges qu’un genre lui dictait, et ce ne sera pas différent avec son The Accountant mais la question est de savoir si il arrive à en tirer ce qu’il y a de mieux ou pas ? Le film n’ayant pas eu une forte publicité, il ne possède que la présence de Ben Affleck pour apporter un peu de lumière sur lui. De quoi ne pas trop générer d’attente chez le public et être dans le conjecture parfaite pour s’imposer comme une agréable surprise.
The Accountant est un film qui a une écriture plutôt cohérente, même si il use de gros sabots dans le déroulement de son récit et que les principaux retournements de situations sont visibles à des kilomètres, il se laisse suivre avec une étonnante efficacité. Évitant de faire que dans l’action, le récit soit avant tout un récit de personnages. Il prend bien le temps de les présenter, les placer sur l’échiquier et de creuser leurs motivations et leurs backstories. Ce procédé implique des retours dans le passé avec des flashbacks incessants et cela peut devenir agaçant notamment dans la deuxième partie du scénario qui devrait plutôt faire avancer l’histoire plutôt que de regarder en arrière mais il permet d’avoir un cheminement intéressant par moments, aidant le film dans sa démarche lorsqu’il traite de sujets importants comme l’autisme et trouver sa place au sein d’un monde hostile. Ce qui entoure l’enfance du héros est donc ce qui devient le plus captivant car le scénario ne prend pas l’autisme à la légère et cela offre un élan d’authenticité aussi perturbant que touchant. Surtout dans la relation père-fils qui définie le personnage principal, où son père entraîne ses deux fils à affronter le monde qu’il juge trop dangereux. Un rapport malsain mais solidaire se lie entre les trois hommes et offre un drama assez solide. C’est au final ce qui se passe dans le présent qui se révèle moins accrocheur, avec une intrigue prétexte à quelques scènes d’action et une romance qui est forcée mais aussi assez mal écrite. Le problème viendra du personnage d’Anna Kendrick qui est le seul à ne pas être creusé et qui n’est réduit qu’à un banal love interest.
Néanmoins, The Accountant peut compter sur un casting solide pour élever les personnages. Ben Affleck est impeccable dans cette prestation monolithique pour un rôle qui semble avoir été fait sur-mesure. L’acteur ne s’est jamais vraiment imposé par de grandes performances mais il tire profit des limites de son jeu pour totalement faire corps avec son personnage. Le reste du casting est plutôt bon, notamment J.K. Simmons qui est le personnage avec le plus de bagage émotionnel et l’acteur excelle a exprimer toutes les nuances de celui-ci. On restera un peu sur notre faim avec Anna Kendrick qui n’a rien à jouer et Jon Bernthal qui reste dans le même registre de jeu qu’on lui connait. Il avait matière à aller dans un développement intéressant de son personnage mais il est malheureusement trop limité par le scénario. Le tout est aussi légèrement limité par sa réalisation qui manque d’exotisme. Que ce soit dans le choix des cadres, les environnement etc, le film parait ronflant et manque par moments d’ambitions. Les scènes d’actions même si efficaces et bien troussées manque d’idées dans les mises en situations ce qui fait qu’elles deviennent vite répétitives et qu’elles ne s’imposent pas face à la concurrence. On a vu le même genre de scènes ailleurs et en mieux. Le travail de Gavin O’Connor n’est en soit pas mauvais, il signe une mise en scène maîtrisée et sans accroc qui remplie sa mission mais il manque d’inspiration pour donner une vraie substance à son film. En résulte un produit bien fait mais tristement générique.
The Accountant apparaît comme un divertissement idéal du dimanche soir. Efficace, par moments vraiment bien écrit et soutenu par un casting solide. Tout est réuni pour passer un moment agréable mais il manque quasiment tout pour que ce moment soit mémorable. Le film est générique, déjà-vu dans son intrigue principale et il manque de subtilité dans sa façon de préparer les twists. L’ensemble ne fera donc clairement pas date, surtout qu’il n’a même pas bénéficié d’un éclairage suffisant dans sa campagne promotionnelle quasi-inexistante. Un film voué à passer inaperçu et à être oublié mais qui avant ça aura le mérite divertir agréablement le spectateur qui s’y sera essayé.
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