Fan de David Lynch depuis l’adolescence, je considère «Mulholland Drive» comme son oeuvre la plus aboutie. Bien entendu, on ne parle pas ici de cinéma conventionnel, et je conçois que cela rebute certains. Sans pour autant se lancer dans un «lynchage» en règle, car c'est tout sauf du foutage de gueule sur le plan artistique.
Tout juste suis-je enclin à reconnaître une forme de perversion narcissique dans cet univers psychologiquement instable, et encore plus dans ce long métrage qui prend place à Hollywood. Un lieu symbolique qui, dans la culture populaire, fait fantasmer autant qu’il suscite des passions bien moins nobles. Une toile de fond idéale pour explorer la dualité du cerveau humain, par exemple celui d’une jeune actrice avide de gloire (Naomi Watts) qui finit par se faire broyer par la machine. L’effet revolver, en somme.
Jusqu’ici, rien de bien original, me direz-vous. Mais mise en scène par Lynch, cette histoire devient troublante, fascinante, quasi hypnotique. D’un point de vue esthétique, c’est un vrai régal, du jeu de clair/obscur au cadrage virtuose. Concernant l’interprétation, on se trouve comme d’habitude en présence de personnages aussi étranges que magnétiques, eux-mêmes plongés dans des intrigues et des endroits improbables (mention spéciale au Club Silencio).
Evidemment, trouver un sens ultime à tout ce déploiement cérébral relève de l’exploit. Mais est-ce bien là l’essentiel ? Moi quand je vais au ciné, c’est pour être transporté. Au fond, peu importe si je ne comprends pas tout du moment que le chemin en vaut la peine. Quitte à se faire mener en bateau, certes, mais quand c’est par Lynch il y a toujours matière à réflexion. Et c’est un euphémisme !
Ce film mérite sans doute une (psych)analyse plus poussée mais je laisse ça à d’autres. Pour ma part, je me contenterai de conclure ainsi : jamais je ne m’étais senti aussi chamboulé devant un écran qu’au premier visionnage de «Mulholland Drive». Emerveillement, effroi, excitation, détresse, j’étais passé par toutes les émotions, sans filtre. Comme si j’avais traversé le miroir. Et depuis, il m’arrive de croire qu’une partie de moi-même est encore coincée dans cette mystérieuse petite boîte bleue. Rêve ou cauchemar ? Finalement, je devrais peut-être aller consulter…

Libaber
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le 29 déc. 2014

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