Le whodunit que l'on peut traduire par "qui l'a fait ?" est un sous-genre phare de l'histoire policière qui consiste à trouver qui a tué quelqu'un. Le genre qui a fait la richesse d'Agatha Christie, mais aussi de bons nombres de séries policières (Columbo et Arabesque en tête) et de la société Hasbro avec le mythique Cluedo (1949). La France ne manque pas d'exemples avec des films comme Huit femmes (François Ozon, 2002) ou Marie-octobre (Julien Duvivier, 1959).
Quand l'affiche de Murder Party est tombée, beaucoup ont fait le rapprochement avec Knives out (Rian Johnson, 2019), criant tout de suite au plagiat. Ce qui reviendrait à dire d'une certaine manière que beaucoup de whodunit se pillent entre eux, au vue de la longévité de ce sous-genre et des clichés phares qui vont avec (comme l'enquêteur, la possibilité multiple de coupables, une figure familiale qui meurt). Soyons clair : Murder Party n'a absolument aucun rapport avec le film de Rian Johnson. Il n'y a d'ailleurs même pas de détective privé ou de policier, puisque ce sont les protagonistes enfermés dans le château qui mènent l'enquête, au même titre que ceux du Cluedo. Le fait que le patriarche meurt est un cliché comme tant d'autres et Nicolas Pleskof s'amuse avec ses personnages, les montrant s'entredéchirer dans un gentil jeu de massacre.
Puis le réalisateur opte pour un twist et le regard sur le jeu de pistes devient plutôt fascinant. Murder Party aurait pu s'en sortir facilement en étant seulement un whodunit classique. Qui plus est en étant un film un brin décalé se déroulant de nos jours, avec un look tout sauf actuel et rappelant le style de Wes Anderson (jusqu'au choix des couleurs un brin flashy et de format). Le twist permet également de mieux comprendre le jeu plutôt excessif de l'ensemble des acteurs et les réactions qui vont avec (les personnages s'insultent copieusement et donnent une certaine ambiance de chaos).
Pleskof et sa scénariste Elsa Marpeau (créatrice du Capitaine Marleau aux côtés de Josée Dayan) jouent pleinement sur le concept de jeu grandeur nature, avec des personnages contraints et forcés de trouver une solution, sous peine de passer à la casserole. Le twist aurait pu dégommer cet aspect bêtement, avec toutes les bonnes intentions du monde. Pourtant, le cheminement est logique et justifié par différentes pistes évoquées tout le long du film. Au final, on se dit qu'un revisionnage serait surement plaisant, permettant de voir d'autres aspects ici et là qui nous aurait échappé. A condition de se prêter à nouveau au jeu, au même titre qu'à chaque nouvelle partie de "mais qui a tué le Colonel Moutarde ?".
Le spectateur découvre les choses au même titre qu'Alice Pol, le personnage extérieur de la famille et le choix n'a au final rien d'étonnant tant elle a un rôle précis. Murder Party a donc plus d'un tour dans son sac et ne démérite pas pour un premier film.