Tourné à l'origine comme téléfilm avant d'être gonflé en 35mm après son succès au festival d'Edimbourg, « My Beautiful Laundrette » n'a aujourd'hui pas pris une ride. Il est d'ailleurs toujours étonnant de voir des œuvres totalement d'actualité à leurs sorties l'être encore plus trente ans plus tard, preuve que Stephen Frears avait sacrément réussi son coup. Proposant une peinture à la fois réaliste et élégante, le réalisateur de « The Snapper » nous plonge avec beaucoup de talent dans ce drôle de monde qu'est celui des pakistanais installés à Londres, où tout ne semble être qu'une question d'argent, de rentabilité. Un monde des affaires franchement désincarné mais pas totalement déshumanisé pour autant, Frears gardant toujours cette petite lueur d'espoir, à l'image du personnage d'Omar. Non pas que ce dernier et son cercle familial soit excusé par l'ami Stephen pour leurs ambitions dévorantes et leur comportements parfois limites, mais on trouve toujours, ne serait-ce que dans une scène, une nuance leur permettant de rester « humain », à l'image de la très belle conversation finale entre Nasser et Hussein. Il n'est pas donné à tout le monde de rendre presque attachant des individus peu fréquentables : Stephen Frears le fait avec beaucoup d'intelligence et de subtilité, bien aidé par un casting en or, l'excellent Saeed Jaffrey en tête. On en oublierait presque la relation homosexuelle entre Omar et Johnny, qui a pourtant fait la renommée du film, mais n'apportant en définitive pas plus que cela au récit, si ce n'est effectivement un rapport plus complexe entre le héros, Tania et sa famille en général, ce qui n'est déjà pas si mal me direz-vous... Le tout sur fond d'opposition raciale hélas loin d'être caricaturale, filmé sans parti pris par un réalisateur décidément épris de justesse et de sincérité. Une des plus belles réussites de son auteur, méritant son statut d'oeuvre culte.