J'ai enfin vu "My Fair Lady". Ça m'a laissée dubitative. J'avoue avoir été un peu déçue. Rapport aux éloges qui entourent le film. Audrey Hepburn surjoue Eliza Doolittle, surtout dans la première demi heure, mais ce n'est pas le plus gênant. Le plus gênant, c'est que son personnage (de jeune pauvrette transformée en Lady par un prof de phonétique arrogant, misogyne et misanthrope) ne reste pas sur sa décision, à la fin, de quitter le goujat et de partir faire sa vie loin de lui, le menton fier. Non, le problème, c'est qu'à la fin, elle revient finalement auprès de lui. Dans un twist scénaristique improbable. En bonne femelle soumise au destin soudain rétréci, car subordonné à son premier coup de cœur.
Ce revirement n'a pas de sens et rend caduque tout ce qui a précédé. La superbe scène où Eliza envoie bouler celui qui en toute immodestie se prend pour son pygmalion voit sa flamme, sa force - et sa portée féministe - réduites à néant. Les atermoiements de l'éconduit, et donc l'idée que ce vieux macho puisse réaliser - un peu - son aveuglement, sa suffisance, sa connerie, perdent eux aussi toute sincérité, toute consistance. Ils n'ont plus lieu d'être : elle revient.
Petite chose incapable de prendre en main son destin, seule, comme un Homme - contrairement à ce qu'elle chantait si fièrement juste avant.
Dommage. Ça gâche vraiment le film. Au final, lui n'aura rien appris d'elle, et elle se sera oubliée dans lui. Encore une comédie romantique en forme d'hymne au patriarcat ?
Dans la pièce originale "Pygmalion" de George Bernard Shaw, Eliza se cassait pour de bon. Mais l'Hollywood le plus gnan gnan aura effacé cette Eliza subversive au profit d'un concours de belles robes, portées par la maigrichonne star bankable du moment.
Boarf. J'vous disais : décevant.