On ne peut que se désoler de l’acharnement avec lequel Kenneth Branagh reconduit ses adaptations du détective Hercule Poirot. Trois films plus mauvais les uns que les autres, prétextes à une débauche d’effets grandiloquents et à une défilade de comédiens grand luxe que le réalisateur ne sait ni diriger ni associer. A Haunting in Venice ne prend même plus la peine de composer une intrigue à tiroirs : l’enquête ne progresse guère, entravée par l’exposition inutile des antécédents de chaque protagoniste ; en contrepartie, la résolution tombe comme un cheveu sur la soupe, associant des éléments qui n’ont pas été motivés au préalable. L’initiation du détective, incarnation de la raison et de la science, au surnaturel n’aboutit qu’à un statu quo prévisible et cliché – la morale énoncée par Poirot laisse sans voix : « il faut apprendre à vivre avec ses fantômes » - qui ne fragilise qu’artificiellement la carrure du personnage.
Le filmage est hideux : les grands angles, utilisés en permanence, déforment l’image sans construire une atmosphère particulière ni composer une esthétique propre ; la photographie enlaidit Camille Cottin en la captant de profil ; la mise en scène charcute des plans au demeurant mauvais, éludant tout ce qui pourrait sembler ordinaire ou banal – pourtant garanties d’authenticité – pour ne garder qu’une moelle osseuse sans substance. Le registre fantastique emprunte au tout-venant des productions actuelles, exploitant les clichés du genre. Seule la partition musicale de Hildur Guðnadóttir présente un intérêt, mais ne saurait justifier le visionnage de cet épisode vain.