Alors autant dire ce qui est : ici, le sujet n'est vraiment pas à la rigolade mais alors pas du tout et c'est pas à faire voir aux petites natures. Film étrange, énormément perturbant et traitant de sujets très dures et extrême, à savoir la pédophilie, l'homosexualité et la prostitution adolescentes, "Mysterious Skin" est un drame coup de gueule vraiment glauque fait pour être malsain et dénoncer les effets de la pédophilie chez les enfants.
Le film ne cherche pas à être provoquant, mais filme sans tabous des scènes troublantes et très dérangeant de viols de deux enfants qui sont les principaux personnages de cette adaptation du livre de Scott Heim, et deux adolescents dévastés pour qui la vie ne sera plus jamais la même. L'un, Brian Lackey, joué par un surprenant Brady Corbet qui m'est inconnu, un intello fuyant la réalité de ses drames d'été 1981 en inventant une histoire d'extra-terrestre pour fuir les faits et qui est victime d'évanouissements répétitives lorsque les évènements d'enfance qu'il avait oublié lui reviennent en mémoire, il cherche à trouver des réponses à ses mauvais rêves et s'enfoui dans une carapace pour ne pas se souvenir de son viol. De l'autre, Neil McCormick, interprété par Joseph Gordon-Levitt avec beaucoup de maturité et insufflant une âme d'un adolescent perturbé qui cherche à s'endurcir extérieurement mais qui s'adonne à la prostitution adolescent après avoir eu une liaison pédophile avec l'entraîneur de base-ball, en s'auto-détruisant intérieurement et s'éloigne de son entourage tout au long de l'histoire.
Chacun, à tour de rôle, raconte leur vie et leur impression à travers ce qu'ils vivent, on suit leur déchéance, leurs mésaventures, leur quête de vérité, la mise en scène est brillante et on assiste à plusieurs scènes traumatisantes.
La bande-son accompagne bien le film, surtout la musique d'ouverture qui nous plonge rapidement dans l'ambiance accrocheuse et pathétique du long-métrage. Alors un film qui dénonce le viol et la pédophilie c'est très osée mais j'y suis pas opposé il fallait le faire parce que ça existe et on n'y peut rien, la manière dont c'est tourné ici rend tout cela plus perturbant encore, on y croit dur comme fer mais au final, Araki ne développe pas de morale durant ce film (et c'est bien dommage), ici il nous choque pas juste pour choquer mais pour nous mettre face à l'existence détruite et bouleversés de deux adolescents qui ne se remettront jamais de ce qui leur est arrivé et on se retrouve confronté à leur pensées et à ce qu'ils ressentent par rapport à leur viol, à leur remise en question, leurs peurs, leurs désirs, ou encore leurs frustrations mais ce film ne se termine pas sur une morale face à ces thèmes.
Le film se conclut sur une révélation aussi terrifiante que bouleversante et cruelle mais il n'y a rien derrière, après je sais pas, c'est peut être le style de Greg Araki mais moi ça m'a foutu un gros bide, le film laisse un grand sentiment de choc et on en ressort très perturbé. Les scènes sont faites pour nous mettre très mal à l'aise, c'est filmé sans censure et on en prend plein le bide, comme un direct du droit qui vient se longer dans notre poitrine.
En bref, Mysterious Skin est un film vraiment cruelle, bouleversant, intense et dénonçant sans censure des thèmes dures, mais sans nous donner de morale, ce qui est frustrant je trouve, surtout pour des thèmes comme ceux là, ça aurait été bien de finir sur quelque chose du genre "parlez en à vos proches, ne restez pas dans le silence" mais finir sur le résumé du drame qu'est leur existence, ça plombe énormément. A côté de ça, "Requiem for a dream" de Darren Aronofsky peut aller se coucher pour ce qui est des films qui pourrissent l'ambiance.
Véritable drame humain perturbant et percutant, lyrique et romanesque, il fait partie de ce type de film (malheureusement) bien trop rare, qui ajoute une superbe ligne à la filmo de ses créateurs et acteurs, mais qui passe inaperçu (seulement 56 000 entrés en France) entre les sorties de blockbusters et autres comédies populaires, finalement bien plus nauséabonde que celui-là. Côté spectateurs, on en ressort sous le choc et sous le charme, le genre d’œuvre qui ne fait pas dans la demi-mesure, on aime ou on déteste, moi, les mots vont finir par me manquer pour vous dire combien j’ai aimé, donc je ne vais pas tarder à conclure… En somme toute, une sorte de petit chef-d’œuvre tranchant comme un rasoir, un film bouleversant qui prend aux tripes, et qui arrive à parler (enfin) de crasse avec classe...