Commençons par l'évidence... Nausicaä est un film magnifique. Il n'y a pas une seule scène qui ne soit empreinte de cette poésie si typique de Miyazaki (rappelons qu'il n'en est alors qu'à son deuxième long-métrage). Déjà, quel univers ! Cette forêt si sublimement toxique grouillant de créatures étranges mais belles (véritable écosystème qui a son harmonie propre, avec ses ômus assez touchants je dois dire), les immenses grottes fossiles où le temps semble s'être arrêté (les chutes de sable régulières évoquant inévitablement un sablier), cette vallée qui vit au gré du vent... c'est ce que j'aime le plus chez Miyazaki : cette sorte de fusion des lieux et du temps, ce présent toujours empreint d'histoire et de nostalgie.
La qualité des paysages et atmosphères suffit à faire oublier les dessins des personnages assez basiques - ce qui est peut-être recherché, comme si les hommes s'effaçaient devant la nature. Ce qui nous amène au sujet principal, certes un peu écolo sur les bords, de l'harmonie Homme-nature. Mais cette harmonie, loin de nous être assénée, est évoquée en toute simplicité à travers le personnage (génialissime) de Nausicaä, qui semble capter le souffle de chaque être et chaque chose. Ce rapport direct à la nature, cette compréhension indicible, est précisément ce qui fait défaut aux autres personnages et conduit à leurs multiples erreurs. Ce qui semble être l'écho de notre propre insensibilité face à cette nature dont notre société s'éloigne encore et encore. Eh oui, en 2017, Nausicaä est toujours d'actualité (j'ai envie de dire : malheureusement...).
La bêtise humaine ne s'arrête pas à cette destruction de la nature, mais elle s'étend bien évidemment à sa propre extermination. J'ai trouvé cet aspect un chouïa moins intéressant, même si Miyazaki réussit à ne pas tomber totalement dans un énième manichéisme. Le guerrier géant, arme redoutable, référence à peine voilée à la bombe atomique, est bien là pour nous rappeler que le film a été créé en pleine Guerre froide... Miyazaki ne manque d'ailleurs pas d'insister sur l'inutilité d'un tel type d'arme.
Bref, il y aurait de quoi écrire des heures, mais cela dénaturerait (sans mauvais jeu de mots) ce film sublime, dont la substance réside de toute façon principalement dans les visuels, leur beauté, l'harmonie qui s'en dégage, et leur côté irrésistiblement organique.