La formule est célèbre: «Je suis athée, Dieu merci!», aurait dit un jour le grand réalisateur espagnol Luis Buñuel. Toute l'ironie et le goût du paradoxe, chers aux surréalistes, sont dans cette phrase. Et Nazarin, ressorti dans une magnifique édition DVD/Blu-ray, illustre admirablement son propos. Tout comme dans Viridiana, qui lui vaudra, trois ans plus tard, à la fois une Palme d'Or à Cannes et un nouveau scandale, ce film tourné au Mexique en 1958 est une charge caustique contre l'un des fondements de la civilisation chrétienne, la charité. La charité qui ne résout rien parce qu'elle ne permet aucune prise de conscience. Et qui, de vertu cardinale se transforme en instrument de soumission. A travers ce portrait d'un prêtre du XIXe siècle magnifiquement incarné par Francisco Rabal, sorte de Don Quichotte au service des plus pauvres, Don Luis poursuit son chemin de cinéaste libertaire, allergique aux idéologies de toute espèce. Ce qui ne l'empêche pas de faire preuve d'une vraie affection pour son malheureux héros, victime des contradictions entre sa foi sincère et un monde dominé par l’égoïsme, la cupidité et l'exploitation de l'homme par l'homme.