Pas un mot.

D’abord, que ce film présenté à Sundance en janvier dernier et ayant fait son petit effet soit catégorisé dans le rayon horreur et épouvante n’a clairement aucun sens. C’est avant tout un suspense psychologique et dramatique et, à la limite, une certaine étude comportementale et sociologique si on veut bien lui ajouter cette carte en fouillant bien. Difficile dès lors de comprendre la promotion basée sur le côté épouvante. « Ne dis rien » voit un couple hollandais inviter un couple danois à venir passer le weekend chez eux. Surpris de prime abord, le second va accepter mais petit à petit ils vont finir par regretter leurs choix à force de comportements étranges jusqu’au point de non-retour. Le postulat est alléchant et le rythme du film est soutenu, sans aucune baisse de tension. Une tension qui va d’ailleurs crescendo de la plus belle des manières. Malheureusement pas mal de choses empêchent ce long-métrage de pleinement nous satisfaire.

En effet, « Ne dis rien » enchaîne un peu trop d’invraisemblances pour convaincre totalement. Même si on veut savoir la fin, on a du mal à comprendre le comportement du couple danois qui reste, revient et reste encore malgré ce qu’il voit et subit. Ces incohérences dans leur choix et leurs réactions sont un peu trop nombreuses. Ou peut-être est-ce juste culturel et par politesse (la fameuse bienséance scandinave)? Dans tous les cas, la famille danoise accepte avec un peu trop de facilités l’attitude de plus en plus impolie voire déplacée de leurs hôtes néerlandais. Ensuite, lorsque le climax arrive, il est quelque peu précipité et pétri également de moments peu vraisemblables. On n’en dira pas plus mais on peut se demander par exemple comment vit ce couple sans revenu ou comment peuvent-ils échapper à la police avec toutes les traces qu’ils laissent. Enfin, l’absence de réel mobile ou de raison est quelque peu frustrante. Une phrase balancée vite fait par le hollandais (« Parce que vous nous avez laissé faire ») est bien trop facile et s’assimile à un aveu de paresse.

Cependant on ne peut qu’être captivé par l’avancée du scénario malgré ses nombreuses scories. Les acteurs sont convaincants et le climat établi fait froid dans le dos. C’est le genre de situation qui pourrait arriver à tout le monde et on se met à la place de ce couple danois désemparé et quelque peu prisonnier de la situation par des codes de politesse sous-entendus. Si « Ne dis rien » n’est pas à proprement parlé une étude sociologique, on y décèle tout de même un constat sur le sujet. C’est gênant, malsain et malaisant au possible. Cela fonctionne par petites touches parfaitement négociées et l’escalade de tension et de malaise fait froid dans le dos. La musique pour le souligner est peut-être trop appuyée et trop tôt mais elle fait son petit effet. Et si la fin est en effet choquante, elle aurait été encore plus magistrale si on avait eu droit à quelques clés de compréhension, moins de zones d’ombre (le personnage de Muhajid!) et d’incohérences notables. En somme des défauts aussi importants que ses qualités pour ce thriller dramatique plutôt original à ne pas mettre sous tous les yeux et qui annonce un réalisateur prometteur (c’est son premier).

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