Ne m'abandonne pas participe de l'effort de la télévision française de hausser le niveau de leurs téléfilms notamment unitaires.
Ici, on évite à tout prix la caricature, les parents d'origine maghrébine sont complètement intégrés à la société européenne (divorcés, ils fument, boivent, mangent de tout), et leur fille n'est pas une gamine paumée qui fume des joints dans une cage d'escaliers (elle réussit sa prépa à sciences-po au début du film).
Et pourtant, elle est tombée dans l'islam radicalisé et prépare son départ en Syrie depuis déjà bien longtemps. Son geste est pensé, réfléchi et on ne peut mieux préparé au point que même lorsque ses parents la confrontent, elle ne se démonte pas.
Le problème des parents est le même que tout à chacun pourrait avoir : comment contre-argumenter pour éviter son départ ? car les arguments simples du genre : Daesh tue des innocents ne tient pas, car la supposée liberté des sociétés occidentales ne fait plus rêver, car l'embrigadement est tel que l'être humain ne peut plus réfléchir que d'une seule façon et qu'il faut batailler en face pour ramener à la raison.
C'est d'ailleurs pour cela qu'il est souvent plus facile et populiste pour les gouvernements de ne penser qu'à punir et non à prévenir. Comme si plus personne ne pouvait songer à guérir le mal de nos sociétés...
La jeune ado partira-t-elle vraiment rejoindre son mari islamiste et entamer une nouvelle vie de combattante ? En tout cas ses parents, sa mère surtout, font tout pour lui rappeler qui elle est, ses souvenirs, revenir à l'humain, aux gens que l'on aime, qui nous ont élevé et au fait qu'en face, ce ne sont aussi que des êtres humains qui peuvent tout autant décevoir et mentir que les occidentaux ! Voilà sûrement une des clés, Daesh, ce n'est pas la poésie ou le paradis qu'ils veulent vendre, c'est aussi des mensonges, des excès, des violences, des privations, des inégalités...
En cela, le téléfilm est réussi, il cherche à comprendre, à suivre les tourments, les doutes d'une jeune fille, de ses parents et nous sommes happés par leur trajectoire.
L'interprétation est juste, j'ai trouvé l'actrice jouant la mère plus faible dans son interprétation que Sami Bouajila qui nous offre une scène formidable avec sa fille dans la maison de campagne.
La partie Marc Lavoine et son fils est finalement assez peu traitée et semble souvent être là pour justifier le reste.
La jeune ado est, elle, la vraie révélation du téléfilm, elle est tout simplement impeccable et d'un charisme formidable (je me souviendrai longtemps de son regard!) !
Voilà donc un téléfilm à regarder avec intérêt, merci France 2...