La douleur marron
Il y a lieu de louer Simon Moutaïrou d'avoir choisi de traiter le thème de l'esclavage, lié au colonialisme des grandes puissances du passé, en l'occurrence ici, la France, dans le territoire appelé...
le 20 sept. 2024
21 j'aime
Ni chaîne ni maître se présente comme une fresque libertaire où la liberté et la révolte sont au centre du récit. Pourtant, sous l’apparente grandeur de son propos, le film trébuche sur des choix narratifs qui brident son élan.
Les protagonistes incarnent des résistances plurielles. À travers eux, le film peint un tableau de la liberté comme combat, mais aussi comme rêve inachevé. Cependant, ces personnages, bien qu’héroïques, demeurent des archétypes. Le rebelle, l’oppresseur, le témoin passif… chacun porte une idée plus qu’une âme, ce qui restreint l’attachement émotionnel.
En convoquant les ombres de figures révolutionnaires, Ni chaîne ni maître cherche à inscrire son récit dans une éternité symbolique. Les chaînes, omniprésentes, deviennent le fil conducteur d’une réflexion sur l’oppression. Pourtant, à force d’insister, le symbole s’épuise. La répétition de ces images métaphoriques—portes closes, murs infranchissables, cages oppressantes, falaises—alourdit le discours, laissant peu de place à l’interprétation. Ce martèlement visuel enserre le spectateur dans les limites du message, plutôt que de l’inviter à explorer ses propres questionnements.
Le récit oscille entre des lenteurs contemplatives et des moments de tension brusque, mal équilibrés. Les scènes introspectives s’étirent jusqu’à l’immobilisme, tandis que les instants de conflit ou d’action semblent précipités, parfois expédiés sans l’ampleur dramatique qu’ils appellent.
Malgré la force de ses thématiques, le film semble tourner en boucle autour de son propre message, sans réellement renouveler son discours ou explorer des nuances inattendues. La révolte reste une posture, l’oppression un poids inamovible. Il manque à cette fable une véritable évolution, une exploration plus profonde des zones grises de la liberté, là où l’utopie se heurte au pragmatisme et où le rêve révolutionnaire dévoile ses contradictions.
Ainsi, Ni chaîne ni maître ressemble à une œuvre qui regarde la liberté depuis une distance théorique, plutôt que de la vivre dans sa chair. Si son ambition est indéniable, son manque de subtilité et de profondeur limite l’écho qu’il pourrait trouver en nous.
Créée
le 28 janv. 2025
Critique lue 20 fois
4 j'aime
D'autres avis sur Ni chaînes ni maîtres
Il y a lieu de louer Simon Moutaïrou d'avoir choisi de traiter le thème de l'esclavage, lié au colonialisme des grandes puissances du passé, en l'occurrence ici, la France, dans le territoire appelé...
le 20 sept. 2024
21 j'aime
Autre lieu, autre époque. Ni chaînes ni maîtres raconte le destin de Massamba et sa fille Mati, esclaves dans une plantation de canne à sucre à l’île Maurice au XVIIIème siècle. En abordant le sujet...
Par
le 14 sept. 2024
20 j'aime
4
Les français aiment glorifier leur histoire pour mieux en effacer ses pages sombres. Pour une fois le cinéma français s’attarde sur la période de la colonisation et de l’esclavage. Si le sujet est...
le 23 sept. 2024
7 j'aime
2
Du même critique
Après Jackie et Spencer, Pablo Larrain clôt sa trilogie biographique féminine en explorant l'énigme, Maria Callas.Loin des carcans du biopic académique, Larraín s’affranchit des codes et de la...
Par
le 17 déc. 2024
22 j'aime
3
Mélodrame incandescent où Florence Pugh et Andrew Garfield incarnent des amants suspendus entre l'éclat fragile du présent et la pénombre inexorable de l'éphémère. Leur alchimie irradie l’écran,...
Par
le 25 déc. 2024
18 j'aime
2
Wallace et Gromit, figures légendaires de l'animation en stop-motion, reviennent pour une nouvelle aventure qui, malgré sa maîtrise technique aboutie, peine à retrouver la magie alchimique de leurs...
Par
le 30 déc. 2024
17 j'aime
8