Strip-Tease, cultissime OVNI télévisuel Franco-Belge diffusé sur France 3 dans les années 90 et 2000, a eu du mal à passer le cap des années 2010. Alors que nous pensions l'émission éteinte après un ultime électrochoc en 2012 (l'épisode "Recherche bergère désespérément" diffusé pour relancer la série a créé une polémique telle que la diffusion TV a été suspendue), Strip-Tease nous prend une fois de plus à contre-pied six ans plus tard avec Ni juge, ni soumise dans un format cinéma inédit qui laisse forcément augurer une toile de maître.
Une fois n'est pas coûtume, Jean Libon et Yves Hinant nous emmènent à Bruxelles, cette fois dans le bureau de la juge d'instruction fantasque et décalée Anne Gruwez, que les connaisseurs avaient pu découvrir en primeur dans l'épisode "Madame la Juge".
Le point de départ est une enquête jamais élucidée sur le double meurtre de prostituées dans les beaux quartiers Bruxellois vingt ans plus tôt. Anne Gruwez, convaincue qu'elle peut solutionner l'affaire en s'appuyant sur son intuition et sur les progrès de la criminologie, rouvre le dossier.
En parallèle, nous assistons aussi et surtout à des entretiens de prévenus qu'elle mène avec un mélange de fermeté désinvolte et d'humour cinglant (pour ne pas parler de véritables punchlines). Déroutant. Parfois même au-delà du réel.
La série a toujours mis un point d'honneur à radiographier la société en montrant l'humain tel qu'il est, sans strass ni paillette, sans gène et surtout sans concession, n'épargnant aucune caste de la population. Plus que fidèle, le film est clairement radical, et le charisme pétillant quoique bordeline d'Anne Gruwez contraste en permanence avec le freak show qui se confie sans retenue dans son bureau.
En dire plus sur la dizaine de portraits au vitriol que dépeint Ni juge, ni soumise serait gâcher la "surprise", retenez en revanche que le film vous emmènera constamment dans un grand huit émotionnel plus intense et plus sombre qu'à l'accoutumée chez Strip-Tease. La folie se conjugue avec le rire et l'euphorie avec le malsain. La dernière partie du film est d'ailleurs tout à fait malaisante et refroidira plus d'un spectateur, même averti.
L'affiche précise "Ce n'est pas du cinéma, c'est pire". Pire peut-être parce que ce cinéma n'en est pas, et que c'est de la Comédie humaine dont il s'agit ?
Ni juge, ni soumise sera sans aucun doute un coup de cœur pour les fans, contentés par un opus de haute volée format XXL, mais ne convertira pas les hermétiques et fera sans aucun doute grincer des dents les (nombreux) spectateurs qui ne sont pas prêts à encaisser cette dose de réalité brute.
(critique publiée initialement sur le site Cinérama)