S’il fallait opter pour un référentiel décriant l’avidité du public à consommer toujours plus d’images fortes et abjectes, il est immanquable que « Night call » se placerait dans les premiers de liste.
Comme le fut en son temps le « Network » de Sydney Lumet, il vient remuer les consciences, voire les réveiller, sans aucune concession et avec une causticité terrible. C’est un véritable pamphlet sociétal, pourtant tout droit sorti des studios, ce qui vient encore en renforcer son impact. Cette espèce d’ascension de Lou Bloom ne relève pas d’un coup de chance ou du hasard. Cet individu calculateur, profondément investi sur son plan de carrière est le reflet de la réussite glorifiée de manière insidieuse par les médias. Il est, humainement, une coquille vide et seules les apparences le feront exister, quelques soient les moyens à utiliser.
Si le film est excellemment bien écrit et construit, sa réussite tient principalement à la prestation de Jake Gyllenhaal. Emacié, yeux exorbités, attitude d’un loup aux aguets il quitte sa défroque de bellâtre d’Hollywood pour incarner cet individu sans foi ni loi. Il est impressionnant par sa folie glaciale et cette détermination à grimper au plus vite les échelons.
La technique vient souligner également cette ambiance plombée et poisseuse. La lumière qui baigne la ville est pesante à souhait, la partition de James Newton Howard inquiétante et le montage très nerveux. On en vient à oublier les moments ou Dan Gilroy s’appesantit un peu dans sa mise en scène et l’on se délecte autant que l’on s’attriste de cette histoire qui est malheureusement le triste reflet d’une réalité… le sensationnalisme qui fait à ce jour vibrer le public a encore de beaux jours devant lui.