Pour les adeptes de fait divers, de mission activiste, de forêts et de suspense...
« Night Moves » est apparu dans les salles françaises le vingt-trois avril dernier. D’une durée approximative de deux heures, il est réalisé par Kelly Reichardt dont je n’avais vu aucun film jusqu’alors. Ce film m’était inconnu jusqu’à sa sortie. Il n’avait pas été précédé d’un matraquage promotionnel marquant. Ses principaux atouts étaient le Grand Prix au Festival du Cinéma Américain de Deauville l’an dernier et des critiques plutôt élogieuses dans les médias spécialisés. La présence de Jesse Eisenberg et Dakota Fanning sur l’affiche n’étaient pas pour me déplaire non plus. J’ai donc décidé de me laisser tenter et de partir à la découverte de cette histoire dont je ne savais pas grand-chose au moment de m’asseoir dans mon fauteuil de cinéma.
Le synopsis proposé par le site Allociné est le suivant : « Josh travaille dans une ferme biologique en Oregon. Au contact des activistes qu’il fréquente, ses convictions écologiques se radicalisent. Déterminé à agir, il s’associe à Dena, une jeune militante, et à Harmon, un homme au passé trouble. Ensemble, il décide d’exécuter l’opération la plus spectaculaire de leur vie… »
La thématique et le ton du film fait qu’il ne s’adresse pas à tous les publics. En effet, les enfants risquent de s’ennuyer et les spectateurs en quête de grand spectacle et d’action seront sûrement déçus. C’est davantage la lenteur qui caractérise le rythme de la narration. Ce n’est pas un défaut mais un état de fait. La lenteur peut s’avérer bien agréable quand elle est bien utilisée. L’atmosphère qui accompagne l’histoire est importante et est valorisée par une salle de cinéma et son grand écran. Néanmoins, cet opus peut se regarder à la télévision sans y perdre son identité sensorielle.
La trame se découpe en deux parties distinctes. La première regroupe la présentation des protagonistes, des enjeux et la mise en place de leur « acte militant ». La concrétisation de leur projet marque le début de la seconde. Elle fait basculer le trio dans l’illégalité et change donc leur quotidien de manière assez radicale. Cette construction fait que l’intrigue possède presque une unité de lieu et de temps. Elle peut être perçue comme la description de l’intérieur d’un fait divers à dimension écologique et militante. La question qui se pose est de savoir si la réalisatrice va davantage axer son regard sur le message politique des activistes ou sur les activistes eux-mêmes.
La réalisatrice fait rapidement exister les lieux et les personnages. Dès les premières minutes, je me suis senti au côté des trois militants. Chacun intrigue. Il possède tous leur part d’ombre. A aucun moment, leur passé n’est réellement explicité. Il apparaît trouble mais le choix scénaristique est de le garder secret. Cela ajoute un côté mystérieux pas inintéressant. Ensuite, j’ai été vraiment curieux de suivre les préparatifs de leur opération. Bien que je ne cautionne absolument pas ce genre d’acte, j’ai été assez fasciné par la mise en place tant matérielle, logistique qu’organisationnelle. Elle est une succession de moments de tension qui m’ont saisi. Le fait que le trio est sur un fil est bien transmis par la mise en scène. Les moments où j’ai pu souffler sont finalement assez rares. J’ai énormément apprécié cette phase du film.
L’exécution spectaculaire de leur opération marque un changement d’ambiance. Les instigateurs deviennent des hors-la-loi et donc des proies pour les autorités. Ils essaient donc de retourner à leur vie quotidienne mais ce n’est pas si simple. En effet, un sentiment de paranoïa apparait. Est-ce la culpabilité, la peur ou autre chose ? Néanmoins, les faits sont là. Il est difficile de reprendre le cours d’une vie normale après de tels événements. Leur engagement impliquait de se séparer afin de ne pas être associés les uns aux autres et de ne pas faire naître des soupçons à leur encontre. Le film s’oriente alors essentiellement sur Josh. On s’immerge ainsi dans le quotidien de cette ferme biologique dans lequel il travaille. Le suspense qui existait dans la première partie a changé de nature. La question qui se pose est : seront-ils découverts et arrêtés ?
La qualité globale de l’interprétation des acteurs est très bonne. Jesse Eisenberg confirme le talent qu’il dégage dans chacun de ses rôles. Dakota Fanning offre une Dena particulièrement intrigante. J’ai beaucoup apprécié la performance de Peter Sarsgaard qui joue un Harmon dégageant une aura à la fois fascinante et inquiétante. Enfin, les différents seconds rôles s’insèrent de manière très juste dans la trame. De plus, Kelly Reichardt exploite parfaitement les décors naturels offerts par la région. Je me suis vraiment senti au milieu de nulle part dans cette forêt de l’Oregon. Les scènes en ville sonnent également vraies et participent au réalisme de l’histoire.
« Night Moves » n’est pas dénué d’attraits. Je me suis laissé prendre par ce petit groupe d’activistes écologistes en mission. La narration les suit au plus près. La dimension politique de leur action est mise en retrait. Malgré tout, je suis ressorti de la salle sans être pleinement conquis. Je pense que la seconde partie est plus diluée en termes d’intensité que la première. La conséquence est que je suis devenu un spectateur plus passif sur la fin. Néanmoins, l’ensemble se laisse regarder avec plaisir. Je ne me suis ennuyé et l’attachement ressenti à l’égard des personnages et de leurs destins a maintenu en permanence ma curiosité éveillée. Je vous conseille donc d’y jeter un œil lors d’un passage à la télévision afin de vous faire votre propre opinion et de découvrir le devenir de Josh, Dena et Harmon…
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