Vagabond sans perspective, Stan atterrit par hasard dans un cirque, où il fait la connaissance d’un médium. Intéressé par ce domaine, il va s’y avérer particulièrement doué… « Nightmare Alley » est l’adaptation d’un roman de 1946, qui avait déjà été porté à l’écran en 1947. Del Toro a fait le pari risqué (et couteux) de garder le contexte des années 30/40, il est vrai plus propice à cette intrigue.
On est frappé en premier par la qualité de la reconstitution, entre des cirques sordides filmés dans la pénombre, et des espaces art déco filmés au grand angle. Mais rapidement, c’est la distribution qui détonne dans ce film. Après avoir raflé une pluie de récompenses avec « The Shape of Water », on imagine bien Del Toro a fait se bousculer au portillon les acteurs en vogue !
Outre l’habitué Ron Perlman, ce sont des gueules telles que Willem Dafoe, Richard Jenkins, David Strathairn ou Holt McCanally qui « meublent », tandis que l’on a droit à Rooney Mara et Toni Colette en seconds rôles féminins. Le clou étant Cate Blanchett en psychologue perfide, qui joue au chat et à la souris avec un fabuleux Bradley Cooper. Ce dernier aurait pu être grandiloquent, il est au contraire sobre et en retenue, pour incarner cet homme peu moral, au passé lourd, qui va embrasser une carrière de manipulateur de premier ordre.
Là-dessus, si le premier acte dans le cirque se traîne un peu (quoique l’ambiance cauchemardesque est de bel effet), la suite est pessimiste à souhait sur la nature humaine. Entre un manipulateur qui parvient à bien lire son public, et des spectateurs parfaitement crédules, personne n’est vraiment à sauver dans cette spirale infernale. C’est d’ailleurs une métaphore bien noire du cinéma qui nous est offerte : les spectateurs se complaisent à être manipulés, se veulent des êtres complexes quand ce qu’ils recherchent est en réalité très simple, et très juteux pour qui les comprend.
Un sujet peut-être trop noir pour le public dans la vraie vie, qui accueillera froidement « Nightmare Alley », avec un énorme flop au box-office.