Il y a des films parfois dont on n'attend rien et qui se révèle de sacrées réussites : « No Limit » en fait incontestablement partie. Très loin du film d'action bourrin et nauséeux suggéré par la jaquette, l'œuvre s'avère en réalité une réflexion passionnante sur la torture et jusqu'où est-on prêt à aller pour sauver des milliers de vie, le tout sur fond de réflexion morale intense et pas un seul instant manichéenne. Au contraire, à chaque fois que l'œuvre se rapproche dangereusement de la caricature et de la facilité, c'est pour mieux s'en éloigner ensuite, les surprises étant nombreuses du début à la fin.
Cela est aussi dû à l'étonnante qualité des personnages, tous infiniment plus nuancés et ambigus qu'on aurait pu le croire, que ce soit cet étonnant personnage de H (Samuel L. Jackson, impressionnant), ou encore l'agent du FBI Helen Brody (Carrie-Ann Moss, d'une classe folle), rapidement prise dans ses contradictions et dont les idéaux vont finir par voler éclats, ou encore ce « terroriste à visage humain » (Michael Sheen, impeccable) pour lequel on aurait presque une certaine compassion parfois...
Et si on imagine ce qu'aurait pu donner un tel projet dans des mains expertes, Gregor Jordan s'en sort avec tous les honneurs, confirmant le talent aperçu sept ans plus tôt dans « Ned Kelly », le dénouement s'avérant bien loin de tout ce que l'on pouvait craindre, à l'image de ce dernier plan d'une sobriété exemplaire... Bref, « No Limit » impressionne à bien des égards et fait froid dans le dos quant à ce qu'il démontre de façon implacable et bougrement intelligente : comment un tel film a pu être boycotté par les distributeurs hexagonaux ?