Dare mo Shiranai n'est pas un film qui plaira à tous. J'aime beaucoup le cinéma asiatique et le cinéma japonais en particulier; J'ai l'habitude du rythme lent, contemplatif, de cette production cinématographique, mais je dois bien avouer que j'ai trouvé ce film lent à l'extrême. Kore-Eda étire ses scènes au maximum sur un film de 2h20, et on a quand même parfois l'impression que le film aurait gagné a perdre une vingtaine de minutes, ce qui aurait peut être renforcé plutôt que déforcé cette sensation de lenteur voulue par le réalisateur. J'ai beaucoup apprécié la première moitié du film qui m'a immédiatement transporté dans l'histoire (la séquence de l'emménagement dans l'appartement est particulièrement réussie). La seconde moitié m'a semblé moins « rythmée » et il y a eu même quelques moments ou je n'ai pu m'empêcher de passer en avance rapide . La dernière demi heure du film est simplement de toute beauté et excuse tous les petits reproches précédents.

Là ou je trouve le rythme très lent, long, étiré de ce film particulièrement adapté, c'est dans la mise en scène de l'enfance. C'est un autre pays l'enfance... Un pays ou le temps s'écoule à un rythme différent du monde des adultes. Rappelez vous ce temps qui s'étirait à l'infini lorsque vous étiez gamins, rappelez vous à quel point votre enfance à pu paraitre longue en comparaison de la vitesse hallucinante avec laquelle le temps passe depuis que vous avez quitté cette contrée pour ne plus jamais y retourner autrement que dans vos souvenirs. Je crois que c'est cette sensation que Kore-Eda cherche à retranscrire à l'intérieur de son film, et c'est vraiment très réussi.

Du point de vue de la mise en scène, j'ai trouvé que Kore-Eda mettait beaucoup de distance par rapport à son sujet, le filmant de manière quasi documentaire. Pourtant ce regard un peu extérieur n'est jamais froid, au contraire, il est rempli d'une belle humanité, d'une absence de jugement, même vis-à-vis de cette mère-enfant qu'on arrive pas à détester malgré ses manquements, son égoïsme, et sa puérilité. Ce regard un peu extérieur donne même plus de force à certaines scènes dramatiques en leur retirant toutes formes de pathos, en ajoutant une certaine forme de légèreté et de poésie même dans les moments les plus noirs et permet d'être touché de manière profonde par certaines séquences. Peut-être arrive-t-elle également à montrer cette capacité particulière des enfants à survivre à tout, a continuer à vivre, et à espérer.

Enfin, comment ne pas parler de la prestation excellente de tout le casting. J'ai particulièrement été fasciné par le jeu de Yuya Yagira dans le rôle du jeune Akira, magnifique de vérité et de simplicité.

Dare mo shiranai est donc un film sur le temps, sur l'enfance, un film subtile, exigeant avec son spectateur, qui lui demande de l'attention, un film à ne regarder que si vous êtes en pleine possession de vos moyens. Ça vaut le coup pourtant, parce qu'au-delà des reproches que j'ai pu lui faire dans cette critique, le film de Kore-eda est régulièrement transpercé par des moments de beauté, de tristesse, de déception, et de cet espoir perpétuel qui n'existe que dans le pays de l'enfance.
Samu-L
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Réalisateur: Hirokazu Kore Eda et Les meilleurs films de 2004

Créée

le 7 juin 2012

Critique lue 1.3K fois

35 j'aime

33 commentaires

Samu-L

Écrit par

Critique lue 1.3K fois

35
33

D'autres avis sur Nobody Knows

Nobody Knows
Sergent_Pepper
8

Au regard des enfants

Filmer l’enfance a toujours été un défi particulièrement délicat ; entre la niaiserie condescendante et un regard d’adulte dénué d’authenticité, le point d’équilibre se fait forcément en réglant la...

le 17 nov. 2016

78 j'aime

7

Nobody Knows
drélium
7

Nobody Home

Premier Kore-Eda. Je ne voulais pas m'étaler vu que tout le monde a déjà parfaitement tout dit mais il donne très envie d'être bavard, sans pour autant crier au génie, parce qu'il marque là où on ne...

le 27 févr. 2013

59 j'aime

8

Nobody Knows
klauskinski
8

Critique de Nobody Knows par klauskinski

Nobody knows travaille sur la durée, la répétition, on pourrait presque dire la scansion, plongeant le spectateur dans un rythme particulier, qui peut sembler à certains agaçant par la lenteur...

le 22 déc. 2010

58 j'aime

3

Du même critique

Star Wars - Le Réveil de la Force
Samu-L
6

Star Wars Episode VII: A New Hope Strikes Back

Divulgâchage épique dans ce billet!!! Au départ, j'avais décidé de pas intervenir. Je m'étais dis: " mon petit Sam, est-ce que ça vaut vraiment la peine de t'embarquer là dedans? Parce que tu sais...

le 18 déc. 2015

286 j'aime

97

Joker
Samu-L
8

Renouvelle Hollywood?

Le succès incroyable de Joker au box office ne va pas sans une certaine ironie pour un film qui s'inspire tant du Nouvel Hollywood. Le Nouvel Hollywood, c'est cette période du cinéma américain ou...

le 8 oct. 2019

235 j'aime

14

Monty Python - La Vie de Brian
Samu-L
10

I say you are Lord, and I should know. I've followed a few

On est en 1993, j'ai 15 ans (enfin plus ou moins), et je m'ennuie un peu en cette soirée d'hiver, je déprime pas mal aussi. J'allume la télévision et je zappe d'une série B à une série française...

le 4 mars 2012

208 j'aime

20