Non, le cinéma français n'est pas mort! Et des réalisateurs talentueux s'évertuent à lui insuffler audace et originalité!
C’est le cas de Bertrand Bonello, dont le dernier film, Nocturama, s’intéresse à des jeunes en rébellion.
Ils s'appellent David, Greg, Yacine, Sabrina, André, Mika, Omar, Sarah, Samir et Fred. Ils ont entre 18 et 21 ans, et ont décidé de frapper un grand coup!
Leur plan est simple:
1- Cibler des lieux stratégiques de Paris et la Défense,
2- y placer des bombes réglées pour exploser simultanément, sans faire de victimes,
3- se réfugier jusqu'au petit matin dans un Grand Magasin de la Capitale, le temps que ça se tasse.
Ce plan, c’est également la trame du film qui débute avec leur passage à l’acte.
Quelques flash-back nous font revivre leur prise de décision. Mais rien sur les raisons de leur révolte, ni sur ce qui les a amenés à élaborer un projet aussi fou.
Puis viennent le repli et l'attente. Déconnectés du monde extérieur, ils errent dans les étages de ce luxueux temple de consommation, et ne semblent pas mesurer la gravité de leur geste.
En se penchant sur le "comment" au lieu du "pourquoi", le réalisateur dresse un portrait-robot saisissant de la génération Z.
Jeunesse multi-identitaire, qui aspire à fondre son individualité dans un collectif.
Jeunesse multimédia évoluant à 100 à l’heure dans un monde où tout est à portée de clic.
Jeunesse débrouillarde qui fourmille d'idées innovantes.
L'énergie fédératrice qui les anime ressemble à celle qui a donné vie au mouvement "Nuit debout".
Mais jeunesse qui a tendance à privilégier la forme au fond, et a du mal à prendre du recul.
Jeunesse qui nous ressemble et pour qui nous développons un sentiment d’empathie. Nous nous disons qu’ils auraient tout aussi bien pu vandaliser des rames de métro et des affiches publicitaires à coup de tags, ou dénoncer les travers de notre société à coup de rimes assassines. Avant de trouver un sens à donner à leur vie et aller de l’avant.
Sauf que le mode opératoire qu’ils choisissent pour exprimer leur ras-le-bol fait écho aux événements qui ont secoué la France, comme cette nuit tragique du 13 Novembre 2015.
Nous connaissons le sort réservé aux personnes qualifiées d’ennemis d’état, et comprenons bien avant eux que leur utopie les condamne.
A mesure que le récit avance et que l’étau se resserre, l’émotion nous prend aux tripes et ne nous lâche plus.
Et au sortir de la salle, “outragé, brisé, martyrisé mais libéré”, le constat est sans équivoque: Nocturama est une belle réussite.