Ce film réalisé par Robert Wise est magistral que vous aimiez la boxe ou non. Il nous montre le dernier combat d’un boxeur, Stoker, qui pour l’argent, sa femme et surtout par fierté, va tenter de mettre «un coup de poing» à son jeune adversaire, celui qui l’étalera et qui lui donnera la victoire. Il y a un tout de même un problème : au 3ème round, il doit abdiquer dès la première droite. Entre un entraîneur qui ne croit plus en lui, un match corrompu et une compagne qui ne viendra pas le voir, on ne donne pas cher de note héros principal. Et pourtant...
«Nous avons gagné ce soir» est centré sur ce combat final, véritable point de chute de cette attente interminable pour Julie, sa compagne, finement jouée par Audrey Totter qui arrive à donner à son personnage toute la détresse (latente et digne) qu’on attend de la situation. Robert Ryan est excellent dans le rôle du boxeur avec un jeu aussi puissant sur le ring que lors de sa préparation. Tel un lion blessé, il se bat tant bien que mal pour une cause que personne ne semble comprendre, ni les femmes sans remords ni les aveugles passionnés : l'honneur.
Si tout le film repose sur ce moment, ce qui intéresse et qui transporte, c’est cette rage permanente de Stoker qui se bat contre son adversaire autant que contre lui-même. Tiraillé entre son devoir par rapport à ce match truqué et son estime de soi, il va livrer une prestation exceptionnelle où on vibre autant que lui à chaque coup reçu et donné. Les tribulations de Julie à travers la ville sont très intéressantes car elles dénotent complètement avec la boxe ; le silence pèse sur elle et son attente rend le temps inestimable. Elle est seule et se noie dans une errance très superficielle pour se détacher de ses doutes. Quel homme sera-t-il après ça ?
Wise joue beaucoup sur le noir et blanc, notamment dans la dernière partie du film, dernier affrontement entre Stoker et ses responsabilités. Il est aussi assez étonnant d'observer que le film se déroule en temps réel, une idée très intelligente qui donne au contenu un sentiment de réalisme supplémentaire. Je conseille ce film sombre et tendu à tous les amateurs de cinéma, car il s’agit là d’un moment court mais qui ne s’oublie pas. Il y a beaucoup d’espoir dans ce film.
Entre «Dreamland» et Paradise city», le rêve prend forme et s’évapore au même endroit. Un bel endroit pour eux.
(Un merci à Docteur_Jivago pour la découverte, même si j'ai fait ça dans son dos, ouh le coquin.)