O Fantasma par pierreAfeu
Premier long métrage de João Pedro Rodrigues, O fantasma impose dès les premières images l'univers singulier du cinéaste portugais. Fantomatique et nocturne, installant très vite un climat érotique particulièrement prégnant, le film avance comme un fantôme, à l'image de son personnage principal, Sergio, mi homme mi animal, mû semble-t-il par ses seuls désirs et fantasmes.
De fait, quasiment sans paroles, le film prend la forme d'une errance fantasmagorique dans une Lisbonne trouble et mystérieuse, seulement soumise, semble-t-il, aux échos des aboiements de chiens. Sergio a 18 ans, est éboueur la nuit, dort le jour, vit dans un monde parallèle. Il croise bientôt la route de João qui va devenir la source de toutes ses obsessions.
Profondément troublant, excitant sexuellement, O fantasma glisse sur une ligne mouvante, entre érotisme et pornographie, montrant puis ne montrant pas, jouant de son personnage principal comme il se joue du spectateur devenant voyeur à son tour, devenant Sergio, partageant ses fantasmes. Comme une échappée belle, se déjouant des pouvoirs, prenant le pouvoir à son tour, celui du voyeur, puis du prédateur en latex, Sergio devient possédé par l'animal qui est en lui.
Jeu de peaux à la nudité fétichiste, jeu de luttes bestiales, d'abandons et de fuites, de douches érotiques et de dépotoirs lunaires, O fantasma est à nul autre film comparable.
En quelques films seulement, João Pedro Rodrigues impose la singularité de son cinéma. Entre rêve et réalité, il compose une odyssée aussi sensuelle qu'étrange, une œuvre riche et troublante dont on a hâte de suivre les prolongements.