Remake inutile et pure jouissance
Ce remake est inutile ; ce film est passionnant. Découvrir directement cet opus a de quoi sidérer. Le comparer à l'Old Boy originel, la Palme d'Or de Park Chan-Wood, emblème depuis dix ans de la vague coréenne, n'est même pas destructeur. Remake assez fidèle, mimétique par endroits, cet Oldboy supervisé par Spike Lee est l'objet de critiques acerbes et semble n'avoir aucun mérite.
Les spectateurs et les experts sont-ils à ce point hypocrites ou gardiens du temple, pour être incapable de reconnaître à Oldboy ses qualités de divertissement hors-pair ? Ce film si détesté ne tente pas de trahir son modèle, mais il est aussi plus humble. Exit l'humour audacieux et les intentions obscures. Oldboy déroule un programme explicite, sans aucune prétention en-dehors du spectacle et pour assumer celui-ci, il sort l'artillerie lourde.
Le scénario s'en trouve à la fois plus lisible et torturé encore. Les auteurs ne sont pas esclaves de l'Old Boy de 2004 et loin de le salir, ils le gonfle, de façon décomplexée et tout à fait innocente. Comme dans une pulp fiction, mais de luxe. Très intense, le film exploite les ingrédients clés de son modèle avec astuce et brutalité. Les excentricités des personnages sont plus limpides, à l'instar de Samuel Lee Jackson, dans le pittoresque total comme à l'époque de Jackie Brown. Le rapport douteux à la violence chez Park Chan-Wood s'efface pour une approche plus sincère, sans humour ni angles ténébreux. L'idylle avec Elisabeth Olsen est délicieuse, sans être tordue ni vaguement glauque.
La célèbre scène de la baston dans les coulisses de la prison est elle aussi boostée et proposée en trois temps ou niveaux, le dernier avec un poignard dans le dos. Enfin la résolution se veut encore plus torturée, tout en admettant là encore la même source que dans l'opus original. Oldboy 2014 n'est pas un film sérieux, ni tellement ambitieux, c'est juste une pure jouissance de spectateur. Il tend toujours vers le kitsch, notamment dans la dernière partie, mais avec une virtuosité et un génie rythmique que la grande majorité des productions auront raison de jalouser, même celles les plus tournées vers l'exploitation ou le genre.
Quand à Josh Brolin aka Joe Doucett, successeur de Choi Min-Sik aka Oh Dae-Su, il campe un vieux garçon très convaincant, très physique, avec des contours lisses et un portrait précis. Il entre en contradiction avec son prédécesseur, personnage plus opaque voir inaccompli et pour cette raison, moins fort, à force de n'être jamais vraiment défini. Au programme, tout est à cette image : là où Old Boy 2004 jouait de l’ambiguïté et de l'indécision, Oldboy 2014 aime donner dans la caricature flamboyante et soignée.
http://zogarok.wordpress.com/2014/07/16/sorties-du-moment-2014-3/