Il y a une recette dans Omar la Fraise qui a tout pour me séduire. Mais les qualités du film sont écrasées et sous exploitées par un rythme impersonnel et un récit bancal qui virent dans un mélodrame pompeux qui n'avait clairement pas besoin d'être là.
Le début démarre plutôt bien. Entre ces incroyables paysages en bord de mer qui semblent fasciner le réalisateur, se développent un contraste sombre dans les petites rues de la ville où dominent la violence et la pauvreté. De cette misère se hisse ce duo, joué par Reda Kateb et Benoit Magimel, deux amis mafieux. Cette introduction est assez efficace car en l'espace de quelques séquences, le film nous plonge dans l'errance et le quotidien de ces deux énergumènes. Entre les soirées en boite sous coke, le petit sport du matin dans la villa, les périodes défoncées où ils dansent ou racontent n'importe quoi, on part dans un style qui me plaît beaucoup, à savoir choisir de s'éloigner d'un récit convenu sur le banditisme, pour juste montrer le quotidien barbant mais aussi imprévisible du mafieux. Cela donne lieu à des scènes assez drôles, à quelques dialogues qui fonctionnent, mais aussi à une manière de filmer la pauvreté, celle d'en bas dominée par les enfants qui doivent vivre dans le crime pour survivre. Bref, une recette qui a tout pour faire un grand film. Malheureusement, passés les 30 premières minutes, Omar la Fraise prend une tournure différente, sans doute par peur d'ennuyer son spectateur, en mettant en place une sorte d'histoire d'amour.
Cette histoire vient complètement plomber le rythme qui commençait à prendre le film, car ce coté convenu qu'il parvenait à esquiver va devenir la source principale du récit. Déjà par le personnage de Samia, cliché de la femme indépendante écrite par un homme, qui a vite fait d'être charmée par un bandit sorti de nulle part et beauf comme pas possible en quelques minutes. Cette relation donne lieu à une séquence de restaurant pompeuse, des dialogues prévisibles, et surtout des ralentis musicaux vraiment ridicules et déjà vus des milliers de fois. Le duo devient alors très secondaire, l'errance aussi. Même la ville, qui ne sert que décor simpliste. La fin perd donc en intensité et s'ancre elle aussi dans un récit de vengeance qu'on a vu des tonnes de fois dans les films de bandits. Mais en plus d'être banal, ce n'est pas forcément très bien filmé ou monté.
La violence est charcutée par les mouvements de caméras très brutaux pour simuler la violence des coups, sauf qu'on ne voit pas grand chose. Et le jeu de ce groupe d'enfants, qui aurait dû pour moi être bien plus au centre de l'intrigue, est masqué par cette succession de gros plans qui jonchent le long métrage. Omar la Fraise perd tout de son potentiel comique et esthétique en choisissant de prendre une voie simple et sans risque. Et c'est vraiment dommage compte tenu de l'admiration que semble porter le réalisateur à la ville, à ses gens, aux paysages, et à ses personnages, surtout avec ce choix intelligent de mélanger les acteurs professionnels avec des non professionnels. Et le coté pauvre et errant dans la ville et les prisons lugubres était aussi un point très intéressant mais totalement sous exploité.
Il reste du film quelques passages vraiment marrants, des plans de la ville très esthétiques, mais tout le reste est détruit par ce mélodrame sentimental pompeux, et ce récit bancal mais surtout très convenu, qui empêche le film d'avoir une fin grandiose et une ambiance qui commençait à émerger dans les 30 premières minutes.