Sous-produit navrant

Il s'agit d'un succédané de "Mortelle Randonnée" (un neo-noir realisé par Claude Miller et sorti deux ans auparavant). On prend les memes (enfin, ceux qui acceptent de signer a nouveau) et on recommence avec la meme formule: la premisse du projet est donc celle d'un neo-noir a l'americaine aux accents erotiques et sordides, avec en tete d'affiche deux monstres sacrés qui vont nous servir du Audiard sur fond de grande ville eneigée. Quand-meme tentant, mais helas a la tete du projet cette fois, c'est Jacques Deray (DeLaRaie de son vrai nom, vu le niveau), alors attendez-vous a du cul-cul du bebete et du gnan-gnan, bref de la merde.

Cote réalisation: DeLaRaie est un tacheron, pas un créateur ni un raconteur. Vous etes donc bon pour le niveau telefilm policier insipide du mercredi soir. Les interieurs sont nuls. Les exterieurs sont horriblement banals. L'eclairage est sans style. La mise en scene est sans cachet. Il y abence de savoir-faire dans la creation d'atmosphere. Pourtant, l'équipe technique est compétante, et le directeur de la photographie est meme excellent. Alors renvoyez ce realisateur a l'école! Qu'il aille voir ce qu'est un film noir et comment on tourne ca!

Pour ceux qui n'ont pas de mesure de comparaison, ce film date de 1985. En 1982, "Blade Runner" (produit avec un budget minuscule) avait instauré un nouveau standard mondial auquel mesurer tous les autres films dans le genre neo-noir. N'est pas un prime Ridley Scott qui veut, bien entendu. Et le cinema Francais en 85 n'avait deja plus beaucoup de bons realisateurs. Mais sur la palette qui s'etend de "genial" a "nul" en passant par "pas mal" et "mediocre", DeLaRaie s'exprime ici dans la nullité. Ne croyez-pas que je l'aie pris en gripe personellement. Comme chacun sait, 90% des scenaristes et realisateurs Francais post nouvelle-vague sont horriblement ineptes. Il n'est ni plus mauvais ni meilleur que le gros de la competition, juste merdique en soi.

Dailleurs, petite note concernant les quelques mini-scenes érotiques de Rampling (ou plutot dénudées car point d'érotisme dans cette facon banale de filmer), DelaRaie aurait pu quand meme pour ces scenes (qui sont sensées etre le clou du film vu qu'il n'y a rien d'autre a voir) utiliser une doublure au lieu de s'atarder sur les seins flasques et les fesses molles de Rampling! Enfin! Voila qui a du faire rater plus d'un role a Rampling apres ca. Mais, bon, il ne faut rien demander a cette face de raie de realisateur je crois.

Coté scenario: DeLaRaie est deja un pietre realisateur -et il s'agit la de son metier. Qu'attendiez-vous de lui comme scenariste qui n'est pas son metier?

Audiard co-signe avec lui le scenario. Je ne connais pas les details de cette colaboration. Mais Audiard est connu pour etre un grand dialoguiste et un scenariste pas terrible du tout, ces fans sont les premiers a le reconaitre. Son scenario pour Mortelle Randonee etait deja tres faible; Alors cette fois en rajoutant DeLaRaie on obtient l'etage encore en dessous.

Sans nous étendre, ce script est horriblement fade, sans evergure, et tombe dans tous les pieges a amateurs de l'ecriture. Le transfer de l'anglais au Francais n'a meme pas ete fait. Ils ont gardé des noms comme Bob, diminutifs comme Bobby. Des marques anglaises etc. La trame reste molle sur toute la ligne, et c'est malheureux a dire mais il n'y a pas une seule scene forte dans ce film. C'est un telefilm policier de routine avec une petite dose de titillation psycho-sexuelle visant la menagere de moins de cinquante ans du Vercors. Quelques idees sont la peut-etre, mais ces scénaristes en herbe ont été incapables de leur donner chaire avec les outils disponibles aux vrais raconteurs d'histoires. C'est attristant d'incompétance, comme c'est le cas bien trop souvent dans le cinema Francais.

Aussi, pourquoi ce titre? On Ne Meurt Que Deux Fois est certes accrocheur, mais... ah, n'en demandons pas trop. La menagere mes amis. La menagere.

Quand aux dialogues, Audiar produit pour son dernier film heuresement quelque bonnes repliques que Serrault recite bien, mais sa prose en general est devenue prédictible, ses formules et ses "con"-siderations ne parvienent pas a tirer cette entreprise du degré final d'insipidité qui la caracterise.

Coté casting: Serrault fait du Serrault, Rampling fait la Rampling. Nous sommes venus pour eux, nous savons deja que leur duo improbable frisera le ridicule, mais nous l'acceptons car nous sommes avertis. Bacri et Rouissillon dans de minuscules roles tirent le film vers le haut durant les courts instants qu'ils apparaissent a l'ecran. Tout le reste du casting est une catastrophe inepte. Au secours! Comment peut-on jouer aussi mal? Elizabeth Depardieu! une honte (ou alors une parodie?). Xavier Deluc! marmiteux! Riton Liebman est nul. Julie Jézéquel! Alors la, on se croirait en pleine emission Streap-Tease avant l'heure. Fuyez ou alors regardez ca comme on regarde un accident de la route. C'est le niveau theatre amateur de campagne sans aucun espoir.

Quand les acteurs sont a ce point mauvais, c'est en partie par manque de talent, mais aussi faute d'un bon directeur d'acteurs. DeLaRaie est peut-etre incompetant avec les acteurs, mais la n'est pas sa tare (beaucoup de grands cineastes ne se preocupaient pas de leur acteurs). Sa tare est de faire de la merde. Nuance.

Metez-vous a la place d'un réalisateur, imaginez que vous avez deux monstres sacrés en vedettes, mais que le reste du casting est fait d'amateurs insuportables, que feriez-vous?

Si un probleme pareil un de ces jours m'echoit, et bien je ferai en sorte que tout le film se passe autour de mes deux monstres sacres, et je limiterai au minimum toute autre interaction. Lorsque par besoin narratif les autres acteurs sont a l'ecran, j'utiliserai la voix off de facon systematique (SURTOUT SI C'EST UN FILM NOIR QUE JE FAIT, ET ENCORE PLUS SI J'AI AUDIARD POUR M'ECRIRE CA). Mais DeLaRaie etant ce qu'il est, ne lui demandez ni astuce ni orphevrerie, d'ailleurs ne lui demandez rien, vous l'avez maintenant compris.

Pour conclure, vous avez Serrault, Rampling et Audiard d'un cote, et de l'autre, un scenario tres mauvais, des acteurs de second roles tres tres mauvais, et un realisateur qui est un mauvais choix pour le projet. Alors, une étoile pour Serrault. Une pour Rampling. Une pour Audiard. 3/10