Once upon a time, il était une fois, c’est l’idée même du Cinéma et c’est celle qui forge le dernier film de Tarantino. Il ne s’agit pas tant de raconter l’Histoire, mais de raconter une histoire, et plus particulièrement Son histoire. Le carton « Il était une fois… une France occupée par les nazis » ouvrait le film uchronique Inglourious Basterds. C’était la puissance de la fiction sur le réel, la force du cinéma capable de réécrire l’Histoire. Tarantino n’a jamais été un cinéaste du réel, il filme un réel fantasmé, habillé par ses obsessions d’hommes, ses prédilections esthétiques, ses motifs référentiels, un réel déformé par le prisme Cinéma. Une dimension parallèle où c’est un peu le réel, mais pas tout à fait le réel, un lieu où tout est faux, joué, rejoué, manipulé. Un univers bigger than life.
Dans ce dernier film Tarantino revisite Hollywood à travers ses yeux d’enfant de 7 ans qu’il avait en 1969, à travers ses souvenirs d’enfance. Il ne filme donc pas le Hollywood de 1969, il filme son Hollywood, comme Leone filmait son Amérique. Un Hollywood bercé entre réalité et fantasme. Un Hollywood où les stars glamour laisseraient la place aux acteurs ringards, aux cascadeurs, où les séries bis has-been occuperaient tout le cadre au-devant des grosses productions.
Once upon a time…in Hollywood est une rêverie. Une flânerie mélancolique et farfelue, une errance nostalgique qui avance en multipliant les micro-fictions et en délaissant volontairement l’idée de trame principale. C’est le cinéma de la digression. Comme quand on revoit Jackie Brown, on le revoit non pas pour son intrigue, mais avant tout pour retrouver des amis et les écouter discuter entre eux, vivre. Ici c’est un peu pareil mais de façon encore plus accentuée.
Ainsi le rythme rompt à chaque nouvelle séquence, accélère, ralenti, mais avance avec une nonchalance étrange. Quelque chose d’un peu déstabilisant et d’assez nouveau chez le cinéaste.
Avec cette impression de n’être jamais au cœur d’une intrigue, mais autour. L’action s’échappant sur des sentiers narratifs alternatifs, des routes annexes. Il y a des personnages, mais qui circulent sans cesse, disparaissent, reviennent. Il y a des musiques qui s’enchainent à la radio, des bouts de tournages, des bouts de fiction dans la fiction, des publicités, des séries,…
Le film dessine une grande mosaïque où chaque détail raconte sa petite histoire, et où tous ces petits fragments d’histoire mis bout à bout dessinent un univers et raconte la vie de ce monde-là, le monde réel déformé par le prisme Cinéma.
Tarantino est un cinéaste fétichiste, rien de nouveau, mais c’est probablement son œuvre la plus minutieuse. Emouvante dans sa manière de remplir le cadre de toutes ces petites choses personnelles, tout en étant passionnante dans sa façon d’aborder le cinéma.