Chez Weerasethakul, la mort n'est pas source de tourment et de souffrance. S'il s'agit sans doute en partie d'une question de culture, il est tout de même important de souligner à quel point le génial cinéaste parvient à réaliser un film apaisé et au final portant peut être plus sur la vie que sur la mort (peut-on d'ailleurs évoquer l'une sans l'autre ?). Car ce qu'il filme pendant plus d'une heure et demie, ce n'est pour la plus grande partie que des moments de la vie quotidienne – parfois certes entrecoupés de réminiscences oniriques – où l'on est en famille, où l'on savoure du miel, où l'on discute avec ses proches disparus – sans même que cela ne paraisse plus étonnant que ça – tout en restant conscient de la destination finale du voyage. À ce titre, la scène du repas nocturne est caractéristique du film : deux « fantômes » y surviennent, mais la réalisation ne fait rien pour accentuer ni la surprise des personnages, ni la nôtre. La mise en scène y traite presque l'intrusion du fantastique comme elle traiterait d'un réel quelconque – le rythme de la séquence ne diffère d'ailleurs pas de celui du reste du film. On pourrait finalement qualifier « Oncle Boonmee » d'œuvre de grande sagesse : où l'on savoure notre existence tout en restant conscient de notre finitude.