Voici un œuvre intéressante et vraiment très étrange, je n’avais pas eu cet exact sentiment depuis Lost Highway. Only God Forgives est film différent de la norme actuelle, il ne faut pas s’attendre non plus à un Drive 2, ça n’a absolument aucun rapport.
C’est assez difficile de décrire le sentiment éprouvé lors du visionnage de cet ovni visuel. Only God Forgives est violent, inhospitalier et complètement barré.
J’arrive aisément à comprendre pourquoi ce film est autant détesté…en fait non je ne peux pas vous mentir, je ne comprend pas pourquoi le public festivalien a donné une standing ovation pendant que la presse (toujours à Cannes) a tout simplement sifflé et hué ce chef d’œuvre. Franchement d’habitude c’est pas le contraire ?
Ryan Gosling y joue Julian, un truand américain retranché à Bangkok où il dirige avec son frère une arène de boxe. Bien entendu ce n’est qu’une couverture pour un énorme trafic de drogue. Lorsque son frère, qui est bien pire que lui, se fait assassiner après avoir violé et massacré une prostituée de 16 ans, leur mère Crystal réclame vengeance (jouée par Kristen Scott Thomas à milles lieux de ses rôles habituels). Malheureusement derrière cet assassinat se cache un ancien flic (magistralement joué par Vithaya Pansringarm), qui quand il ne chante pas des chansons sentimentales dans des karaokés, il se prend pour une sorte de Dieu tout puissant faisant régner la Loi à coup de décapitation.
On flirte ici entre bordel Lynchéen, violence à la Tarantino, arts martiaux et complexes œdipiens.
Maintenant qu’on ne vienne pas me parler de violence atroce ou d’apologie à la violence, ce n’est pas le cas. Et puis ce n’est que du cinéma, c’est une fiction, personne dans le film ne dit du bien de cette fameuse violence, même si Nicolas Winding Refn a réussi à la sublimée. Le travail de recherche et de perception apportée par le réalisateur est tout bonnement incroyable, les angles de caméra et surtout les couleurs y sont à tomber par terre. On retrouve très souvent des rouges, noirs et bleus très prononcés, le film est certes noir par son scénario mais reste très coloré dans sa réalisation. C’est rare de voir quelque chose d’aussi beau d’un point de vu artistique dans le cinéma d’aujourd’hui où seules les explosions comptent (même si je ne suis pas contre).
Ce style graphique pourrait provenir de deux personnes en particulier. D’une le film a été réalisé en hommage à Alejandro Jodorowsky, grand nom de la bande-dessinée et responsable d’œuvres telles que L’Incal ou La Caste des Métabarons.
D’autre part, Larry Smith, le directeur de la photographie a travaillé à trois reprises avec Stanley Kubrick, sur Shining, Barry Lyndon et Eyes Wide Shut.
Une autre personne qui mérite d’être saluée pour sa performance est Cliff Martinez, déjà responsable de la bande-son magique de Drive. Il signe ici quelque chose de plus sombre, plus électronique mais étonnement ponctué de chansons douces uniquement en thaïlandais. Les chansons sont surprenantes mais fonctionnent très bien avec l’ambiance malsaine qui règne tout au long du film. Si on devait décrire cette bande-son, je serais capable de parler de mélange entre celle d’Halloween 2 (la version originale) et étrangement de Tron Legacy (le second film).
Je ne peux que m’incliner devant cette œuvre envoutante digne d’un David Lynch, Only God Forgives est un film bien plus complexe que la masse populaire ne le pense.
Pour le plaisir un petit extrait musical :
http://www.youtube.com/watch?v=KKOZ75b1YuU