Bangkok, la ville de la souffrance physique et psychique. Le rouge, couleur du sang, couleur de la beauté horrifique, couleur du cauchemar, couleur de l'impuissance. Voici Only God Forgives.
Le film n'a certes pas la majestueuse théâtralité de Bronson ni la fascinante perfection de Drive, mais n'en reste pas moins captivant.
Only God Forgives est un pur cinéma de la sensation. Il y a un sentiment d'oppression dans son silence, un sentiment de perte effrayante dans la grandeur et la noirceur de ses décors. Mais au-delà du traitement visuel, ses décors sont la représentation métaphorique à la fois de la frontière et du rapprochement entre le cauchemar, le fantasme sexuel et le réel. Comme si l'hallucination, l'horreur et la folie avaient le regard partout et étaient prêtes à aspirer le spectateur à tout moment.
Cela semble si imprévisible et incontrôlable que le personnage de Julian (interprété par un Ryan Gosling d'une splendide noirceur) est totalement impuissant. Nicolas Winding Refn lui fait tomber sur la tête un véritable défouloir contre lequel il ne semble même plus réagir :
- Relation amour/haine avec sa mère
La mère, une dirigeante sans pitié d'affaires criminelles qui n'hésite pas à dénigrer voire humilier son fils mais qui à l'image d'une Lady MacBeth cherchera inlassablement à laver, à cacher les tâches de sang sur ses mains en déplorant les meurtres commis par sa propre initiative.
Avec un cadre très concentré sur les mains - liées, coupées, baignées dans le sang - Julian semble, dans le profond désespoir de son impuissance, se questionner constamment sur le caractère temporaire et dénué de l'existence elle-même (à l'image du héros Shakespearien MacBeth). Ce sont ses mains qui semble accueillir ouvertement l'ange de la mort - représenté sous la forme d'un héros à sabre sanguinaire et impassible - comme si Julian recherchait la rédemption afin de trouver une complaisance dans une forme de vie autre que la réalité, trouver sa complaisance dans le franchissement de cette barrière du décor qui forme cette séparation avec le rêve.
Julian est un héros déchu d'avance, à la différence de Chang qui serait le véritable maître décisionnel de la vie, une forme de dieu.
Un dieu accordant le pardon par la souffrance et la mort.