Si vous pensiez que tous les films de vampires des années 2000/2010 sont mauvais, clichés, etc., vous avez tort. Only Lovers Left Alive, film 2013 de Jim Jarmusch, sélectionné pour la Palme d’Or, n’est pas un film de vampires comme les autres. Ce film d’ambiance dégage, comme tous ceux de Jarmusch (…apparemment, mais je n’ai encore vu que celui-ci) une atmosphère langoureuse et sombre. Ici, le mot « cool » prend tout son sens. C’est-à-dire que tout dedans est détendu, relax : les personnages sont on ne peut plus décontractés, l’histoire (si on peut dire qu’il y en ait une) avance à une vitesse lente, mais n’est pas pour autant ennuyante, et cela surtout grâce à la mise en scène, la musique et les excellents acteurs.
En effet, Tom Hiddleston joue parfaitement le rôle d’Adam, l’éternel jeune vampire brun ténébreux, musicien rock qui esquisse rarement un sourire, à l’accent anglais séduisant, comme si le rôle avait été créé pour lui, et qui lui va puis-je dire, beaucoup mieux que le rôle de Loki, mais bon ça, c’est une autre histoire. On retrouve aussi une irréprochable Tilda Swinton, actrice qui fait rarement de mauvaises prestations de toute manière, en Eve, l’âme-sœur absolue d’Adam. Je ne sais pas si les prénoms Adam et Eve signifient que ce sont les premiers humains (d’après la Bible évidemment), mais en tout cas je l’ai perçu comme ça. Ces deux personnages s’aiment tellement, sont tellement soudés intellectuellement, que même à l’autre bout de la terre, ils sentent leurs émotions. Eve vit à Tanger, au Maroc avec un autre très vieux vampire joué par John Hurt, et Adam vit dans la version moderne de la Transylvanie, la ville abandonnée et sombre de Détroit, dans une maison recluse. Nous retrouvons aussi une énergique Mia Wasikowska, une habituée des personnages un peu loufoques.
Durant tout le film nous avons des contrastes étonnants mais qui s’entrelacent parfaitement : d’un côté nous avons la modernité très sombre avec la musique rock en fond, et de l’autre l’esprit marocain accompagné de musique arabe. D’ailleurs la musique est un constituant principal du film, elle contribue à l’ambiance sombre et ensorcelante qui émane de ce long-métrage vampirique. Il y a beaucoup de longues scènes sans dialogues dans lesquelles la musique emplit le silence et c’est ce qui le rend tellement séduisant. Tous comme les films de Sofia Coppola, il y en a beaucoup qui diront que le film est long et ennuyant, tout est question de gout ici. Mais pour une grande fan des films de Coppola, malgré que ce ne soit pas tout à fait le même genre dû à l’aspect fantastique du film, je dois dire que celui-ci est plus original et « soigné » dans la mise en scène et les personnages. Par exemple la maison d’Adam est dans un bazar pas possible mais pourtant tout semble longuement réfléchi et dans l’ordre.
Le romantisme mis en scène dans ce film est différent de celui dans toutes les autres relations entre vampires, celle-ci n’est pas niaise, il n’y a d’ailleurs aucune scène de sexe et ni (d’après mes souvenirs) de baisers fougueux, si ce n’est qu’une très belle scène où ils sont entrelacés paisiblement dans un lit. Et c’est là toute l’efficacité et la beauté du film, Jarmusch n’a pas eu besoin de montrer de proximité physique explicite pour que le spectateur ressente l’amour éternel et puissant des deux personnages.