Oppenheimer : Quand l'homme se dresse en divinité fragile

Attendu au tourant après l'accueil mitigé de Tenet, Oppenheimer est-il le feu d'artifice épique promis par Nolan ?

La première partie du film est un véritable ascenseur émotionnel, réussissant avec brio ,par le biais d'une écriture soignée associée à un acting irréprochable, à nous impliquer dans la création de la bombe nucléaire à travers la vie d'Oppenheimer (assurément l'une des meilleures interprétations de Cillian Murphy au cinéma).

Mise en scène, musiques et décors s'imbriquent parfaitement pour nous offrir à la fois une montée en tension constante couplée à des moments de vie plus intimes d'Oppenheirmer permettant de cerner son personnage à travers sa moralité, ses ambiguïtés et ses responsabilités.

Cependant, l'histoire est par moment assez indigeste. Les différents sauts de temporalités alliés à une approche hétéroclite (politique, morale, scientifique...) et très verbale des implications d'une arme sans précédent desservent un scénario haletant, mais asphyxiant.

N'en reste pas moins une sensation grisante à suivre le récit où tout semble nous impliquer dans la démesure, l'angoisse et la contemplation. Le point d'orgue se jouant dans la double scène d'explosion, toutes les deux brillamment exécutée dans l'intention et la réalisation. La première étant celle de la bombe où Nolan déjoue les attentes par une mise en scène déroutante. La deuxième étant celle du créateur de la bombe, Oppemheimer, lorsqu'il doit se présenter devant un public à la limite de l'extase à la suite de la réussite du projet Manhattan. Parallèle évident entre les deux scènes, mais à l'impact terriblement frappant lorsque le scientifique perd sa toute-puissance acquise devant la contemplation de sa création pour laisser place à une terreur qui est elle bien mortelle, à sa propre explosion.

Si les dernières minutes du film donnent une conclusion poignante des conséquences de la bombe et du poids des répercussions tant sur le monde que sur Oppenheirmer (avec une très belle scène entre Oppenheirmer et Einstein), le dernier tiers du film me laisse perplexe.

À l'image de la bombe nucléaire où la première partie du film en serait son explosion, une implosion aussi impressionnante/chaotique que captivante, le dernier tiers en serait sa fumée, spectre frappant mais forcément moins impactant que ce qu'elle était au moment de sa détonation. Trame judiciaire classique, un peu trop longue au vu de la durée du film et souffrant de la comparaison avec le reste de la trame plus impliquante et touchante.

Néanmoins, Nolan nous donne surement l'un de ses meilleurs films. Une mise en abyme bouleversante d'une page tragique de notre histoire où l'homme joue aux dieux. Découvrant que contrairement à des déités détachées émotionnellement et physiquement de leur création, il doit faire face à sa fragilité (inhérente à la complexité de sa nature) et assumer inexorablement les conséquences de ses actions à la portée qui le dépasse.

Jeremiah_G
8
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le 26 juil. 2023

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Jeremiah_G

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