Christopher Nolan, cinéaste acclamé pour ses films audacieux et sa propension à déconstruire les récits conventionnels, se lance dans le genre biographique avec "Oppenheimer", une plongée dans la vie complexe du père de la bombe atomique. Cependant, malgré l'attente intense suscitée par chaque projet de Nolan et la promesse d'une réflexion profonde, le résultat final laisse un goût mitigé. Le film, déployé sur une durée considérable de trois heures, tente de dépeindre les différentes facettes de la vie d'Oppenheimer, de son implication dans le projet Manhattan à ses démêlés avec le maccarthysme. Cependant, cette ambition démesurée engendre des déséquilibres narratifs et une absence de subtilité qui impactent l'expérience globale.
Le récit commence avec une mise en scène maladroite, rappelant le style de Terrence Malick, mais dépourvue de la grâce élégiaque propre à ce dernier. Le film prend ensuite un ton plus sérieux et fouillé lorsqu'il plonge dans les coulisses du projet Manhattan et l'effort pour développer la première arme nucléaire. Ces passages passionnants nous offrent un aperçu des enjeux scientifiques et moraux qui entourent la création de cette arme destructrice. Cillian Murphy incarne brillamment J. Robert Oppenheimer, apportant une nuance et une profondeur au personnage.
Pourtant, malgré les éléments captivants, le film souffre d'une durée excessive qui peine à maintenir l'attention du spectateur tout au long du parcours. Les logorrhées plombantes de l'audition visant à discréditer Oppenheimer comme communiste nuisent au rythme et à la fluidité du récit. De plus, l'approche stylistique de Nolan, bien qu'impressionnante dans sa mise en scène et son utilisation du format IMAX, manque parfois de la sobriété nécessaire pour aborder des thèmes aussi lourds.
La mise en lumière des dilemmes moraux et des pressions politiques auxquels Oppenheimer est confronté, bien que potentiellement fascinante, ne parvient pas à être suffisamment approfondie. Les aspects personnels et psychologiques du personnage semblent souvent relégués au second plan, laissant le spectateur avec un sentiment d'incomplétude.
Dans sa tentative de dépeindre une psyché complexe, le film sacrifie la subtilité au profit d'une narration souvent boursouflée. Le résultat est un portrait émotionnellement distant, où les moments d'impact sont enterrés sous des couches d'exposition et de dialogues verbeux. De plus, l'utilisation excessive de la bande originale, bien qu'initialement séduisante, devient parfois envahissante et ne parvient pas à renforcer les émotions du film comme elle le devrait.
Néanmoins, "Oppenheimer" n'est pas sans mérite. Le projet Manhattan et les préoccupations morales entourant la création de l'arme nucléaire offrent une perspective intrigante sur les dilemmes scientifiques et éthiques qui traversent le film. De plus, la performance de Cillian Murphy et certains moments visuels remarquables témoignent du talent de Nolan en tant que cinéaste.
En fin de compte, "Oppenheimer" souffre de son ambition démesurée et de sa propension à lourder l'histoire avec des détails inutiles. Le film manque la subtilité et la profondeur nécessaires pour faire ressortir les aspects les plus captivants de la vie d'Oppenheimer. Alors que le réalisateur cherche à embrasser la réalité et à explorer des thèmes complexes, le résultat final manque de l'équilibre nécessaire pour en faire un film mémorable et transcendant.