Surtout : « n'ayez crainte, l'esprit sorcier d'un destin justicier se chargera de rétablir l'ordre intrinsèquement généreux de la nature. »
→ La mise en scène :
Oranges sanguines est un film moyen sur le plan esthétique : Jean-Christophe Meurisse ne sait pas quoi faire alors il bouge lentement sa caméra quand les personnages parlent, se suicident ou violent/se font violer, tuent/se font tuer. Bref, comme d'habitude aujourd'hui, la caméra ne raconte rien puisque ce sont les personnages qui s'en chargent.
→ Le jeux des acteurs :
Oscille entre mauvais (Lilith Grasmug, ultra gênante quand elle pleure) correcte (Vincent Dedienne, Guilaine Londez) et très bien (Blanche Gardin, Christophe Paou, Céline Fuhrer, Denis Podalydès, Alexandre Steiger).
On sent parfois une vérité poindre – ce qui n'est plus très fréquent – cela mérite d'être souligné.
Mais en tant que film de 2022 (donc déjà dépassé) l'essence du film n'est évidemment pas – malheureusement – dans ses attributs purement cinématographiques : les films, aujourd'hui, ne sont presque tous que des instances de validations idéologiques ultra-manichéennes.
Les scénaristes – élevés à Star Wars (donc à Walt Disney) – ont définitivement pris le pouvoir.
Procédons de manière empirique : quel est le propos du film ?
Les français vu par Jean-Christophe Meurisse.
Qui sont-ils, ces français ?
● Les vieux couples (blancs) dansent le rock'n'roll (musique de vieux ringards blancs) sont endettés et se suicident avec tendresse - en riant, bien sûr (le suicide c'est marrant).
● Les hommes (blancs) politiques ont une grosse bite (on la montre dès que c'est possible), sont des arnaqueurs qui placent leur argent sur des comptes étrangers et font des partouzes avec de jeunes prostituées étrangères :
mais n'ayez crainte, l'esprit sorcier d'un destin justicier se chargera de rétablir l'ordre généreux de la nature.
● Les hommes péri-urbain prolos (blancs, cela va de soi) sont des harceleurs misogynes, virilistes, dégueulasses, grossiers, laids et toujours dans leur bagnole pourrie et polluante :
mais n'ayez crainte, l'esprit sorcier d'un destin justicier se chargera de rétablir l'ordre généreux de la nature.
● Les hommes (blancs, pauvres, solitaires et vivant à la campagne) nourrissent dans leur salon d'énormes cochons monstrueux et poilus - clin d’œil brutal dont l'objectif évident est de montrer l'hideuse accointance entre le cochon (métaphore d'une France rance et islamophobe) et le français non urbain (forcément dégénéré et destiné à disparaître) - avant de violer et torturer les personnes qu'il croise par hasard :
mais n'ayez crainte, l'esprit sorcier d'un destin justicier se chargera de rétablir l'ordre généreux de la nature.
● Les avocats urbains (blancs et sans muscles) sont tiraillés entre un virilisme touchant (inoffensif puisque sans attribut de force physique) et une volonté de justice dont les contours sont encore mal définis : l'homme blanc urbain est en « phase de déconstruction » (il est râleur mais il est sur la bonne voie).
●Les jeunes filles racisées (noires) sont drôles, bienveillantes, à l'aise avec leur corps et leur sexualité.
● Les jeunes filles (blanches) sont névrosées et coincées mais finissent par violer (prenant ainsi leur sexualité en main) des jeunes hommes (blancs et coincés eux aussi) – déployant enfin leur libido jusque-là écrasée par un patriarcat (sûrement blanc, on l'imagine) – et ça c'est cool. Elle fera preuve de cruauté – filmée comme courageuse (la reine des neiges chez Tarantino) envers l'homme blanc psychopathe, islamophobe, tueur et violeur en série qui vit à la campagne : elle lui coupera les testicules, les mettra au micro-onde et les lui fera manger.
● Les jeunes hommes racisés (arabes) sont des ombres qui n'ont ni voie au chapitre, ni droit au cadre – le jeune homme arabe (en couple avec « la reine des neiges » à la toute fin) n'est qu'une abstraction nécessairement muette, habillé comme dans les années 80, filmé de loin et fuyant le cadre – avec sa nouvelle petite amie – le patriarcat raciste blanc.
Un petit film paresseux cinématographiquement et idéologiquement.