Au même titre que l’éléphant, l’épaulard, plus connu sous le nom d’orque, semble avoir une mémoire photographique des plus incroyables. Cette particularité biologique servira le récit du long-métrage “Orca” de Michael Anderson sorti en 1977. À Terre-Neuve, le capitaine Nolan (Richard Harris) est un pêcheur qui vend ses plus grosses prises aux aquariums les plus offrants, sans se préoccuper de la faune aquatique, contrairement à Rachel Bedford (Charlotte Rampling), une biologiste marine. Un grand requin blanc fera que le chemin de Rachel croisera celui de Nolan. A travers l’impressionnant prologue, Michael Anderson (“L’âge de cristal”) nous montre l’intelligence, la puissance et l’instinct de survie de l’orque, lorsque celui-ci sauvera Ken (Robert Carradine), l’associé de Nolan, des mâchoires acérées d’un grand requin blanc. Nolan impressionné par l’animal - et surtout par le prix qu’il pourrait en tirer - décide de capturer une femelle malgré les réticences de Rachel qui étudie ces mammifères cétacés. Malheureusement, la femelle se blesse contre l’hélice du navire, hissée à bord, elle mettra au monde un petit qui mourra aussitôt. Cette scène atroce se passe sous les yeux du mâle qui hurle sa douleur. À cet instant, le destin de l’épaulard sera lié à celui du capitaine Nolan. Choqué et pris de regrets, mais trop tard, Nolan ne le sait pas encore, mais il devra payer le prix de ses actes, quand l’orque mènera une traque sans pitié contre lui et son équipage. Bien plus qu’un énième ersatz du cultissime “Les dents de la mer” de Steven Spielberg sorti deux ans auparavant, “Orca” possède son identité propre en faisant du récit, une véritable fable écologique, couplée à un magnifique long-métrage d’aventures. Au même titre que le dénonciateur “Long weekend” de Colin Eggleston, Michael Anderson filme lui aussi, une nature vengeresse à travers l’itinéraire d’un animal blessé psychologiquement par la perte des siens. En humanisant ce mastodonte de plusieurs tonnes, le réalisateur tente d’éveiller les consciences sur les conséquences de nos actes face à la nature. En prenant à revers, le récit du “Moby Dick” d’Herman Melville, Michael Anderson et ses scénaristes Luciano Vincenzoni et Sergio Donati transforment l’animal en véritable Capitaine Achab, face à un toujours aussi charismatique Richard Harris en marin chevronné et en humain traqué, entraîné malgré et à cause de lui vers une inexorable confrontation finale. S’ensuit un épilogue blanc comme la banquise et froid comme la mort, un combat de David contre Goliath.