En 4ème, on est censé lire un grand roman. En tout cas, c’est ce qui est écrit dans le programme. Mais la classe dans laquelle je bosse n’est pas du genre à se laisser instruire sans broncher, voyez-vous. C’est plutôt le genre de groupe à terroriser du remplaçant au p’tit dej’ et à le regarder droit dans les yeux en lui disant : « Mais en fait, vous êtes pas vraiment prof de maths. Ça se voit ».
Bref, d’après les confidences de la prof de français, on devait s’attaquer aux Misérables cette année mais devant l’ampleur de la tâche, l'enseignante a préféré taper dans le moins ambitieux. Ce sera Oscar et la dame Rose, tant pis pour Hugo, ils le liront plus tard (c'est-à-dire jamais). Après avoir étudié le bouquin, les élèves ont eu le droit de voir le film, dont je vais parler ici, puisque du livre, je n’ai lu que les chapitres étudiés en classe.
Pour résumer, Oscar, 10 ans, est atteint d’une leucémie et vit dans un hôpital pour enfant. Ses parents, qui ont appris récemment que sa maladie était incurable n’osent pas le lui annoncer. Oscar, qui a bien compris qu’il ne lui restait que peu de temps à vivre, les hait pour leur lâcheté. Mais un jour, le garçon rencontre « mamie rose », une vieille dame bénévole qui ne mâche pas ses mots, et qui pour la première fois, lui parle de la mort sans tabou. Une amitié va naître entre les deux personnages. Bref, tout cela contient une forte dose de cul-cul, gnan-gnan, neuneu (ou tout autre mot avec deux fois la même syllabe exprimant cette idée de naïveté), mais d’après ce que j’ai pu en lire, le livre a au moins le mérite d’aborder avec une certaine finesse la question difficile de la mort et du regard des gens qui lui font face.
Le problème du film, c’est qu’il ruine les quelques bonnes idées du bouquin par des choix hasardeux. Déjà, prendre Michèle Laroque en actrice principale, faudra qu’on m’explique. Il me semble que la vieillesse de Mamie Rose est une caractéristique importante du personnage. Elle a vécu des choses, fictives ou pas, qui font qu’elle a un mauvais caractère, qu’elle raconte des anecdotes marrantes, et qu’elle parle sans retenue à un gosse mourant. Et son bénévolat fait qu’en tant que lecteur, on sait très bien que son mauvais caractère n'est qu'une façade.
Ici, le personnage n’est plus une mamie, et n’est même plus bénévole. La voici devenue livreuse de pizza, cynique sans trop qu’on sache pourquoi, et forcée de parler régulièrement avec le garçon. Évidemment, on devine dès la première minute qu’elle va changer au contact du gamin, parce qu’au fond, "elle a un cœur gros comme ça » ! Et v’la t’y pas qu’on lui colle des mômes et un plan cul, sans même changer les autres caractéristiques du personnage.
Je sais pas vous, mais moi, une ancienne catcheuse acariâtre de 45 ans, je n’y crois pas une seconde.
D’ailleurs, à mon goût, les scènes de catch sont ratées. Les combattantes font des pirouettes dignes des Power rangers et les bruitages sont ceux de dessins animés. On est plus dans le rêve que dans le fantasme de gosse. Je suppose que c’est voulu, pour accentuer le côté imaginaire des anecdotes de Rose, mais si j’avais encore dix ans, je préférerais voir la harpie du Poitou et l’équarrisseuse de Montargis avec des tenues fluo moulax et des coups bas. Le film Denis, pourtant loin d’être irréprochable, rend beaucoup mieux le côté fantasque et désuet de ce catch des années 50.
Sinon, Oscar excepté, les gamins sont insupportables, et le film montre clairement la mort du garçon, ce qui rend la scène bien tire-larmes comme il faut. Il me semble que dans le bouquin, on l’apprenait indirectement, avec un peu plus de délicatesse.
Tout cela nous prouve donc que même l’adaptation d’une œuvre moyenne peut-être ratée.
Mais je dois vous avouer qu’en dehors du film, si je suis un peu dégouté, c’est en grande partie parce que je n’ai jamais eu le courage de lire les Misérables. Ça fait des années que les deux tomes servent de support à mes lunettes sur la table de chevet. C’était l’occasion rêvée… Foutue prof !
P.S : j’avais prévu de publier cet avis en juin dernier, mais allez savoir pourquoi, il est resté inachevé dans les tréfonds de mon disque dur. Voilà qui est donc corrigé, mais les souvenirs du film en pâtissent forcément. Par honnêteté intellectuelle, j’aurais du le revoir, mais j’ai eu la flemme. Donc si je dis des conneries à certains endroits, vous avez légitimement le droit de me cracher à la gueule.
P.S.2 : Et pour ceux que ma vie intéresse, entre-temps, je suis passé en troisième^^