Alexandre Aja est un exemple unique de cinéaste français contemporain à avoir réussi à mener une carrière de réalisateur consacrée entièrement au fantastique et à l’horreur qui lui a valu d’avoir une reconnaissance publique et critique des deux cotés de l’Atlantique . On est heureux de le voir ici aux commandes grâce à Netflix d’un projet Français de cinéma de SF , son premier film en français depuis prés de 20 ans qui devait être à l’origine réalisé par son protégé Franck Khalfoun (Maniac) avec Anne Hathaway puis Noomi Rapace, dont on peut dire qu’il n’a sur le plan visuel et scénaristique rien n’a envier à la production américaine. Dans Oxygène on retrouve les thèmes qui irriguent la plupart de ses films : la survie et la résilience qu’il a souvent traité via le prisme horrifique et comme ici avec des personnages féminins fort. Ici c’est Mélanie Laurent , autre artiste française à avoir réussi une carrière des deux cotés de l’Atlantique, comme actrice on se souvient évidemment d’Inglorious Basterds et plus récemment de sa participation au 6 Underground de Michael Bay mais aussi comme réalisatrice avec le pas mauvais Galveston , qui est l’incarnation de cette héroïne. L’actrice entre dans la peau d’une amnésique qui se réveille dans une capsule cryogénique avec un compte à rebours mortel, le niveau d’oxygène du caisson diminuant rapidement. Si le spécialiste français du genre abandonne le gore qu’il affectionne souvent il conserve toutes ses qualités de narration pour animer cet exercice difficile qu’est le suspense en huis-clos. En effet Oxygène est une pièce à un seul personnage dans un décor unique, des personnages secondaires étant représentés par leur voix ou dans des souvenirs. Le plus important de ces personnages secondaires est la voix suave et désincarnée tour à tour drôle ou inquiétante de Mathieu Amalric qui incarne M.I.L.O., une intelligence artificielle qui supervise la capsule et évoque évidemment une version française du HAL 9000 de 2001 L’Odyssée de l’espace. Oxygène a évidemment une résonnance particulière en cette période de COVID, il a été tourné durant le premier confinement bien que son script, signé Christie LeBlanc figurait sur la fameuse Black list des scénarios non encore tournés avant la pandémie.
On pourra évidemment reprocher au scénario quelques facilités (l’abus de flashbacks ou la facilité d’accès de l’héroïne à internet) ou incohérences. De la même façon en injectant des indices visuels comme des plans de rats de laboratoire dans des labyrinthes, des expériences médicales interdites et des flashes de ce que Liz présume être sa vie passée, le réalisateur de Crawl brise l’illusion d’être pris au piège avec Liz. Mais cela ne nous a pas dérangé d’une part car la plupart des films en huis-clos extrême y ont recours et d’autre part grâce à la réalisation énergique d’Aja l’urgence du compte à rebours est maintenue tout au long de la durée du film. Alors que Liz rassemble lentement les pièces du puzzle de sa situation , le film nous conduit simultanément à nous demander si certains éléments ne sont pas le produit d’épisodes psychotiques ou d’hallucinations induites par l’isolement. Beaucoup de la réussite d’Oxygène vient de la performance de Laurent , qui si , là encore l’actrice peut avoir quelques tics de jeu ou inflexions agaçantes il faut saluer sa performance tour à tour désemparé, désespérée, déterminée et débrouillarde- n’interagissant qu’avec des voix désincarnées ou avec un moniteur d’activité cérébrale semblable à une amibe flottant au-dessus d’elle. Le travail visuel sur le film est impeccable , Maxime Alexandre le directeur de la photographie attitré d’Aja compose une image dominée par des blancs cliniques et des bleutés métallique du plus bel effet et sa caméra explore toutes les possibilités pour offrir de nouveaux angles dans ce cercueil hi-tech. Le montage de Stéphane Roche (The Voices, Persepolis) contribue au rythme propulsif du film. Autre élément primordial la partition atmosphériques du compositeur Robin Coudert, crédité sous son nom de scène, Rob (Le Bureau des Légendes, Maniac) . Autre réussite à mettre au crédit du film celle des effets visuels produits entre autre par la société Mac Guff en particulier la superbe séquence de la révélation dans un mouvement de caméra majestueux de l’environnement entourant la capsule. Le principal défaut que nous trouvons au film c’est , alors que la tension de l’histoire se relâche dans les derniers moments avec la divulgation de pans plus explicatifs de l’histoire, Oxygène se prolonge après une séquence qui aurait fait une belle conclusion dans l’esprit sinistre des histoires de EC Comics ou des épisodes de Twilight Zone.
Conclusion : Malgré une intrigue qui n’est pas aussi hermétique que la capsule dans laquelle l’héroïne est enfermée Oxygène est un excellent thriller de science-fiction claustrophobe qui repose sur la performance de Mélanie Laurent et on est plutôt heureux de voir Netflix permettre à un film français de rivaliser avec beaucoup de production US.