Quand les Kaijus dominaient le monde.

La magie du cinéma tien décidément à peu de chose. Il suffit parfois d'une petite étincelle, d'un simple tour de passe-passe pour nous replonger dans un monde que l'on pensait à jamais inaccessible à l'adulte que nous sommes devenu. Cinéaste de l'envie, du rêve, du partage, Guillermo Del Toro m'a offert un beau cadeau. Il a fait renaître des sensations, il a rappelé à mon bon souvenir le bonheur que cela fait d'être un môme de neuf ans découvrant les premiers pas d'un bébé raptor, assistant, impuissant, à l'enlèvement de Fay Wray par un gorille géant. Un gosse lisant la terreur dans les yeux de Mia Sara à la vue du prince des ténèbres, frémissant à l'approche d'un requin géant, rêvant de piloter un Labor et de voler aux côté de Peter Pan. Pendant plus de deux heures, j'ai eu des étoiles plein les yeux et la bouche pleine de Nutella.

Blockbuster typiquement hollywoodien piloté par le plus attachant des geeks, "Pacific Rim" est le film que les 25-35 ans attendaient fébrilement depuis qu'ils sont en âge de rêver. "Pacific Rim" est un concentré de magie, un feu d'artifice à la coolitude absolue, un rollercoaster démentiel d'une générosité à vous coller la larme à l'oeil. "Pacific Rim" est la rencontre entre Goya et Go Nagai, entre Lovecraft et "Evangelion", le délire fou d'un grand gamin qui ne rêvait que de monstres géants.

Là où Michael Bay se servait de ses Transformers pour balancer du gag puéril, se foutant royalement de son audience, Del Toro fait preuve d'une sincérité désarmante, d'un amour pour son public et ses créatures, d'une absence totale de cynisme rafraichissante dans le paysage hollywoodien. Le metteur en scène du "Labyrinthe de Pan" réalise le blockbuster ultime, peint sous nos yeux ébahis des tableaux grandioses, iconise ses êtres de métal comme le ferait un otaku en chaleur, nous procure l'érection la plus solide de la création avant une gigantesque éjaculation de bonheur.

Jouant superbement avec les différences d'échelle, parvenant à créer un univers étonnamment crédible à partir d'une introduction exemplaire, "Pacific Rim" bénéficie également d'effets spéciaux à la pointe de la technologie, d'une musique entraînante et d'une photographie remarquable, ce qui compense un scénario un peu simpliste malgré quelques bonnes idées (le partage des souvenirs en premier lieu) et un manque certain de folie et d'émotion, si l'on excepte ce superbe flashback convoquant les fantômes de Hiroshima et de Nagasaki, rendant au genre du Kaiju Eiga sa fonction première, celle de divertissement cathartique en réponse aux atrocités de la guerre.

Si les personnages ne sont hélas qu'à peine esquissés, les comédiens qui les incarnent sont tous excellents, que ce soit Charlie Hunnam, parfaite image du héros nippon (un comédien japonais aurait été peut-être trop évident), Idris Elba, au charisme dévastateur, Rinko Kikuchi, aussi belle que touchante ou encore Ron Perlman, visiblement content d'être là. Même Charlie Day arrive à être supportable dans son rôle d'alter ego du cinéaste.

Aussi généreux qu'imparfait, "Pacific Rim" ne cherche jamais à être autre chose que ce qu'il est, un putain de manga live qui envoi du lourd, la réponse à toutes ces grosses productions sans âme et mercantiles, une immense déclaration d'amour à tous les mordus de monstres que la terre peut contenir. Un grand merci à vous et votre équipe Monsieur Del Toro, vous venez de me faire rêver comme je ne l'avais plus fais depuis longtemps, tout en assommant sans sommation la concurrence à venir. Messieurs les producteurs, remballez vos marchandises, la récrée est terminée !

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le 21 juil. 2013

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Gand-Alf

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