"La guerre, c'est la misère", est-ce que c'est un pacifique rime ?

Maintenant que j'ai votre attention avec cette blague pas piquée des hannetons, place à la critique.

J'avais pas mal peur en allant voir Pacific Rim. Je ne suis vraiment pas un gros fan de blockbusters. Au mieux, ils m'indiffèrent, et au pire, j'ai l'impression qu'on se fout pas mal de ma gueule (coucou 2012, Avatar et autres Man of Steel).

En regardant Pacific Rim, je ne me suis ni ennuyé, ni eu l'impression qu'on se fichait de moi.

Commençons par le principal, à savoir ces énormes machins qui se battent contre d'autres machins non moins énormes. Laissez-moi vous dire que ça envoie le paté en croûte.

Les effets numériques au cinéma m'ennuient magistralement. Je les trouve bien faits mais absolument pas crédibles. C'est beau, mais au final ça n'égalera jamais un bon décor grandeur nature, avec ses défauts, ses contraintes pour la photo, mais une âme véritable. Au lieu de ça, les réalisateurs sautent sur les effets numériques qui leur permettent toutes les folies pour nous servir un visuel complètement insipide (coucou 2012, Avatar et autres Man of Steel).

Mais Pacific Rim, de mon point de vue, change la donne. Ce n'est pas seulement une prouesse technique, c'est une tuerie visuelle. Au revoir les effets insipides. Les robots et les kaiju sont travaillés à l’extrême. Les sentiments de démesure et d'inertie sont rendus avec beaucoup de crédibilité. Le travail sur les séquences de dérive et le passage quasi onirique au delà de la brèche est dingue.

Pour une rare fois, je n'ai pas passé la moitié du film à me dire que ça aurait été mieux en vrai, que ce n'était que des effets spéciaux putassiers destinés à cacher la vacuité du scénario. Pacific Rim a (un peu) fait remonter les effets numériques dans mon estime. Du moins, il m'a donné de l'espoir pour la suite. Ce n'était pas juste bien fait, ça avait de la gueule.

Bon, ça avait de la gueule, mais ça, ça n'a jamais fait un super film. On reste quand même dans un blockbuster où le scénario tiens sur un plan de la ville d'Angoulême (qui est, rappelons-le, une ville plutôt petite, mais très jolie). C'est presque inhérent au blockbuster. Eh bien c'est justement avec son traitement du genre "blockbuster" que Del Toro a vraiment emporté mon adhésion.

Michael Bay, James Cameron et Zack Snyder (sauras-tu trouver les films incriminés, cher lecteur ?), se prennent vraiment trop au sérieux. Comme s'ils refusaient de comprendre que le propos de leur film est complètement absurde de bout en bout ! Bon, c'est peut-être un parti pris, de vouloir rendre crédible coûte que coûte un film sur un homme volant ou des extraterrestres qui font l'amour avec les cheveux. C'est peut-être un parti pris, mais ça marche pas.

Del Toro, de toutes ses considérations, il s'en contrefout. Il a bien compris qu'il faisait un film avec des robots et des monstres géants qui se tapent dessus. Et c'est peut être parce qu'il n'a pas fait que des blockbusters dans sa carrière qu'il fait preuve d'un recul bien trop rare dans ce domaine. Je m'explique.

Il y a cette scène, où le poing du robot vient frapper avec une délicatesse extrême un pendule de Newton, avant de repartir démonter la tête du kaiju. Déferlement de "ppppffff" dans la salle, comme si c'était trop. Les gens qui échappent à la fin du monde 50 fois en 3 heures de film, à la rigueur, mais le coup du pendule, là non ! Eh bien oui, c'est trop, justement. Cette scène, ce n'est qu'à la puissance 1000 ce qui fait l'essence d'un blockbuster. Sauf que Del Toro, lui, il ne fait pas dans la demi mesure, et il ne prend pas son spectateur pour un con. "Quitte à faire un ptit truc drôle, autant que ce soit bien débile au passage, on est dans un blockbuster les mecs, sortez vous les doigts des fesses !". C'est peut-être ce qu'à dit Del Toro à l'écriture (peut-être).

Je vois bien l'acteur jouant le scientifique allemand, après le désastre à Hong-Kong, commencer à taper au clavier (sans souris, c'est un film). Et là Del Toro interrompt là scène : "Non mais attend tu crois qu'on fait un film d'auteur là ? Allez, tu vas me taper plus n'importe comment sur ce clavier s'il te plait, même pas avec tes doigts, avec tes mains !" *martèle le clavier comme un fou*. Dans les blockbusters normaux et nuls, les gens tapent très vite sans souris, et c'est ridicule. Dans les blockbusters de Del Toro, les gens cassent le clavier avec la paume de leur main, et c'est ridicule, mais au moins le spectateur n'est pas pris pour un con, et ça, ça fait plaisir à voir.

Tout cela relève du détail mais ça a vraiment joué dans mon appréciation du film. C'est un film honnête. Merci M. Del Toro d'avoir pris votre pied comme ça et de nous avoir emmené avec vous. Merci d'avoir compris que si on laissait notre cerveau à la porte, ce n'était pas une raison pour en profiter honteusement afin de ne pas se fouler (coucou 2012, Avatar et autres Man of Steel).

J'ai aussi vu dans ce film un hommage aux films de monstres des années 50/60, avec leur naïveté sympatoche. A part ça, les acteurs n'étaient pas formidables, et il manque clairement un thème musical plus prenant. Mais c'était quand même vachement bien (ça, c'est de la conclusion).

Ma scène préférée [spoiler] : la chute du jeiger de l'autre côté de la brèche, dans cet espace onirique, merveilleux. Le traitement de l'image à ce moment précis transporte vraiment dans un autre monde. Chapeau.
BastienCl
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le 9 août 2013

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BastienCl

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