Manga américain vu par un mexicain

C'est bon. J'ai enfin, au bout de quatre visionnages, "accepté" Pacific Rim. De mémoire, j'ai rarement été aussi déçu par un film la première fois que je suis allé le voir en salle. À mon avis, je l'attendais trop au tournant : un sujet qui touche le grand gamin qui sommeille en moi, le tout dirigé par l'un de mes réalisateurs préférés, qui chantait sur tous les toits que c'était son bébé le plus personnel... t'avais pas le droit à l'erreur Guillermo !

On va commencer par ce qui me gêne dans ce film :

- Le concept de conduite à deux des mechas : oui c'est original, mais ça prend beaucoup trop de place dans le récit, et franchement ça n'apporte pas grand chose à une histoire qui aurait pu être fouillée davantage sur d'autres aspects plus pertinents. Au final, c'est juste une acrobatie pour justifier la mort du frère du héros et pour le rapprocher de la petite japonaise.

- Les combats : pourtant spectaculaires, ils sont un peu mal dosés et pas toujours très lisibles : par exemple, la bataille finale est carrément moins impressionnante que les autres et on a parfois l'impression d'une bouillie numérique violacée lorsque kaijus et jagers se cognent dessus.

- L'apparition des kaijus manque de subtilité, une mise en scène plus suggestive à la manière de The War of Worlds de Spielberg ou du Godzilla de Gareth Edwards aurait contribué à les rendre plus inquiétants et aurait pu mieux nous faire appréhender leur gigantisme.

- Les personnages : trop caricaturaux ou trop peu charismatiques, aucun ne m'a vraiment convaicu. Leurs enjeux personnels sentent le plat hollywoodien réchauffé ou sont survolés. Même s'ils possèdent une certaine sympathie, le décalage permanent entre des protagonistes loufoques et un contexte de crise très premier degré ne fait pas bon ménage.

- Un scénario finalement très convenu, qui ne surprend nullement et qui ne dépasse pas son stade initial.

Malgré un bon nombre de défauts, Pacific Rim ne possède pas moins de qualités :

- La direction artistique : la volonté de faire quelque chose de beau transparaît dans chaque plan. On est bien au-dessus du lot des blockbusters en matière d'éclairage et de gestion du cadre...

- La mise en scène est originale pour un film catastrophe, ainsi que le contexte de lieu : à la place des sempiternelles mégapoles américaines, nous avons droit à des villes plus colorées et organiques comme Tokyo et Hong Kong, ce qui donne à la péloche une singularité de bon aloi.

- Les scènes d'exposition des jagers sont réellement belles et impressionnantes, et contrastent avec celles des kaijus, moins marquantes.

En fait, la seule manière que j'ai d'apprécier vraiment ce film est de le voir comme un manga-live. Mais les tronches de ricains n'auront jamais le charme ni l'expressivité singulières des personnages dessinés japonais, et la vision occidentale d'un tel sujet ne sera jamais aussi bien traitée que chez nos amis nippons, chez qui les catastrophes d'Hiroshima et de Nagasaki ont tout de même créé un traumatisme palpable dès qu'il est question de destruction de masse...

Conclusion : Pacific Rim est une réussite en demie-teinte, bien meilleure que la plupart de ses contemporains mais décevante et perfectible sur bien des points, et, malheureusement pas à la hauteur de ses ambitions. Cependant, le film demeure un divertissement honnête et on ressent cet amour sincère de del Toro pour sa création.