Sorti en 1971, Panique à Needle Park est le second film de Jerry Schatzberg. Réalisé entre Portrait d'une enfant déchue et L'Epouvantail. Il s'agit d'un film typique du Nouvel Hollywood post guerre du Vietnam, où émergent des cinéastes posant un regard plus chirurgical sur les maux de l'Amérique.


Dans Panique à Needle Park, titre qui raisonne comme un cri d'alarme, Schatzberg évoque dans un style brut, dénué d'effets pompeux, quasi documentaire, sans musique, juste les bruits de la rue et les dialogues désaccordés, la descente aux enfers de jeunes protagonistes plongés jusque là dans l'enfer de la drogue.


Un style underground vient encrasser cette bluette à la Roméo et Juliette qui montre un jeune couple confronté à un démon qui les détruit à petit feu. Le couple interprété par un Al Pacino déjà fascinant de justesse, gesticulant et débitant un flots de mots souvent vains, mais donnant vie à un personnage désabusé, sans cynisme, et l'actrice Kitty Winn, qui n'aura pas la carrière qu'elle aurait dû avoir est touchant.


Le but du réalisateur est de montrer la déchéance de l'addiction en n'hésitant jamais à appuyer là où ça fait mal. Certaines scènes sont à la limite de la contemplation, mais pas de ces scènes d'exposition tendant à esthétiser l'immontrable, mais une incursion au scalpel, chirurgicale et sans concession. Je pense à ces longs plans de shoot qui installe un réel malaise. Une surdose d'images choc, jusqu'à l’écœurement.


N'étant pas un cinéaste moraliste, Schatzberg se contente d'appuyer là où ça fait mal et réussit sans doute l'un des films les plus juste sur les effets de la drogue et son pouvoir de corruption sur les êtres.


Pur film de New-yorkais seventies, on retrouve les rues de la grande pomme avec ses taxis jaunes et ses tours qui flirtent avec les nuages, ses badauds qui déambulent et ses personnages qui semblent perdus dans cette immensité bitumée.


Sans atteindre la dureté et le trop plein crasseux des films de Paul Morrissey (Trash, Flesh et Heat), autre cinéaste New-yorkais, qui lui ira encore plus loin dans l'exposition, Schatzberg parvient à capter l'essentiel et à adopter une démarche radicale mais non dénuée d'émotion.

philippequevillart
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le 11 sept. 2016

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