En matière de nanars, je suis très friand de films turcs, surtout ceux avec la star locale Cuneyt Arkin. Un ami, que j'ai initié à ce type de divertissement, m'avait donné à voir Panzehir, un film récent avec Arkin, mais supposément un bon film. En tout cas, pas un nanar. J'étais pas très motivé du coup, un long-métrage de 2h... j'ai pas tellement foi en le cinéma turc. Ca m'a pris plusieurs mois avant que je ne me décide à regarder ça.
L’histoire est très classique, Kadir, un tueur à gages pour une des plus importantes organisations criminelles d’Istanbul, décide de quitter le milieu, au nom d’une femme. Mais son boss ne l’entend pas comme ça bien sûr.
Ca devient intéressant toutefois quand Kadir se fait empoisonner, et a 6 heures pour tuer les chefs des deux clans adverses. On le force à emmener avec lui un homme qui s’est avéré être un flic infiltré, pour l’aider. Une idée un peu bizarre, même si ça doit être parce qu’il importe peu pour les mafieux qu’il meure ou non.
C’est plutôt intéressant de voir comme le policier, se disant être dans le même bateau que le tueur qu’il devait au départ traquer, cherche à l’aider. Il a pour avantage, par rapport à Kadir, d’être grande gueule et fort en bluff.
Mais à part ça, la complicité entre les deux personnages ne fonctionne pas vraiment. Et j’ai eu du mal à me sentir impliqué par l’histoire, même avec les quelques rebondissements qu’il y a.
Je pense que c’est surtout parce que je n’étais pas attaché au héros. On essaye d’approfondir le personnage par le biais de flashbacks et de grandes phrases en voix-off, où il parle de regrets, de l’enfer sur terre, etc… mais ça ne marche pas. L’acteur n’exprime pas grand chose, et on dissocie le type impassible que l’on voit à l’image de tous ces propos en voix-off, qui sonnent faux.
Je reconnais quand même à Panzehir le mérite d’essayer de traiter avec sérieux l’aspect tragique qu’il y a dans le fait que cet homme approche de la mort ; il y a d’autres films avec un sujet semblable où le personnage se contente de buter tout le monde sans se poser de questions.
Panzehir veut décidément faire comme les américains, mais en adopte aussi certains défauts. On retrouve ce procédé dont je suis las, qu’on voit pleins de fois dans la dernière saison de Game of thrones par exemple, qui veut qu’en plein milieu d’une conversation un personnage raconte une histoire pour illustrer son propos, au lieu de donner une réponse directe. Personne ne fait ça en vrai !
Et on retrouve également une BO du genre de celles qu’on entend partout depuis Inception…
En revanche, il faut avouer que Panzehir bénéficie d’une belle "production value", et d’une réalisation classe. Il y a de beaux plans, et par moments de bonnes idées de mise en scène, par exemple lorsqu’on rejoint implicitement l’intériorité de cette femme aveugle, par le biais de gros plans qui soulignent un détail, une sensation que le personnage doit percevoir.
La symbolique de certains plans n’est pas toujours très subtile : lors du repas d’adieu pour Kadir, tout le monde est assis du même côté d’une longue table, comme durant la Cène. On sacrifie la logique pour ce clin d’œil insistant.
Mais là où la réalisation est réellement faible, c’est lors des moments d’action, pas très bien filmés. Les plans sont courts, la caméra peu stable, et pourtant ça n’arrive pas toujours à masquer la mollesse ou la facticité de certains coups. Ni à faire passer des choses complètement irréalistes : les deux hommes qui tirent sur quinze autres, à découvert, et qui s’en sortent…
Panzehir n’est pas mauvais, mais comme je le craignais, le film n’a rien de spécialement remarquable non plus. C’est pour ça que je rechignais un peu à le voir, je doutais que ça serait une œuvre digne de rester en mémoire.
J’ai pas vraiment été emporté par l’histoire, il manque quelque chose pour vraiment saisir le spectateur. Certains des twists sont prévisibles. C’est dommage, car le point de départ aurait pu donner quelque chose de mieux.