Liberté. Un mot qui perd son sens et devient un prétexte à filmer tout ce que l’on veut dans un contexte déjà chaotique. Paris est à nous, c’est ça, un film qui se veut loin de toutes contraintes pour retranscrire une réalité chamboulée dans une France qui n’avait nul besoin de cette mise en scène.
Filmer Paris est un privilège, les parisiens seront d’ailleurs ravis de voir tous ces lieux de la vie parisienne à l’écran mais malheureusement l’idée s’arrête là. De Montmartre à République, la caméra déambule aléatoirement dans les rues sans savoir filmer ses acteurs. Les images sont belles, la lumière parfaite mais hormis l’esthétisme qui retient un peu l’œil, qu’est-ce que l’on retient du film ? Son vide, son discours vain et ses fausses notes qui s’accumulent. Le film prend aux plus grands réalisateurs pour servir un ramassis de raté. Il ne sert à rien d’essayer d’imiter le génie de Terrence Malick ou de Gaspard Noé quand on ne l’est pas. Faire valser la caméra au son de dialogues pseudo philosophiques qui ne proposent rien d’autres que du vent, auxquels on ne croit pas une seconde. Faire une voix off semblable à un slam de Fauve quand on n’y sent aucune sincérité. Aimer la France de la liberté est une bonne chose, mais savoir la sublimer est une tâche bien différente et plus complexe où la démarche artistique doit être aussi bien dans le sens visuel que dans celui de l’écriture. Le scénario est ici totalement absent et les néons mêlés aux musiques réussies de Laurent Garnier et Jean Charles Bastion ne suffisent pas à faire un bon film.
User de l’Histoire française moderne pour rendre compte d’une génération nouvelle, perdue mais sans cesse en quête de liberté était une base intéressante sauf quand l’instrumentalisation d’événements tragiques est plus que bancale. Charlie Hebdo, Nuit Debout, les attentats du Bataclan, la police partout et même un hommage à Johnny sous fond de discours du Président, ah oui la France change. La société évolue et les sentiments de ses habitants aussi, le tournant dans lequel nous nous trouvons actuellement a tout le mérite d’inspirer les artistes et de créer en même temps qu’une nouvelle génération, un nouvel art dans une nouvelle ère. Mais il ne faut pas tout bousculer, pas tout changer si l’on veut rester efficace. Ce qui part d’une idée jeune, novatrice et belle s’avère être un film pénible et raté où le jeu est faux au possible. On l’aurait pardonné si ça avait été un court-métrage étudiant et non un film diffusé par Netflix. Comment peut on espérer maintenir le cinéma français en éveil avec ce genre de films ? À l’heure de la nouvelle génération de cinéastes émergeant qui prouvent que justement, il y en a encore en réserve et que la relève est présente, Netflix diffuse les caprices d’une bande de potes comme premier film français de la plateforme.
On ne peut pas se vanter de faire du cinéma avec rien et ne rien faire. Ah oui c’est sûr, il y a une proposition, artistique ça reste encore à prouver mais commerciale en tout cas. Paris est à nous, est à vous, est à tous. S’affranchir des règles de tournage en refusant d’attendre les autorisations, frein à bon nombre de réalisations, est un risque qu’il fallait prendre. En revanche, non, les visages de tous ces gens filmés sans autorisation ne vous appartiennent pas et faire un film qui parle de liberté quand on oublie les simples droits individuels, c’est un peu culotté. De la manipulation ? On ira peut-être pas jusque là mais Paris est à nous est problématique dans un grand nombre de choses. L’audace n’apporte pas toujours un résultat satisfaisant.
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